II. L'OCCASION OFFERTE AUX EGLISES

 

Un fait d'une grande importance s'est passé dans le monde. L'esprit de destruction a ravagé la terre, laissant le monde du passé et la civilisation qui régissait notre vie moderne en ruines à nos pieds. Villes et foyers ont été détruits, royaumes et souverains ont disparu ; les idéologies et les croyances auxquelles on était attaché n'ont pas réussi à suffire aux besoins du peuple et se sont effondrées sous l'épreuve des temps ; la famine règne et tout est incertain.
Des familles, des groupes sociaux ont été éparpillés ; la mort a pris ses victimes dans toutes les nations et des millions ont péri par suite des mœurs inhumaines de la guerre. En général, tout le monde a connu la terreur, l'anxiété et le désespoir devant l'avenir. Chacun se demande ce que le futur réserve et nulle part n'existe la sécurité. La voix de l'humanité s'élève au ciel, suppliante, implorant paix, lumière et sécurité.

Certains les cherchent dans quelque idéologie nouvelle, d'autres, dans des doctrines politiques et espèrent être secourus et libérés, grâce à l'action d'un gouvernement particulier, par des idées ou un parti politique. D'autres attendent qu'émerge un chef, mais celui-ci n'apparaît actuellement nulle part. Ceux qui mènent proviennent de groupes bien intentionnés, ou ce sont des hommes d'Etat aussi embarrassés que ceux qu'ils cherchent à secourir. L'immensité de leur tâche de reconstruction les rend à peu près impuissants, car il s'agit de reconstruire, de reconditionner et de rééduquer le monde entier. D'autres encore, plus patients, établissent de nouveaux programmes éducatifs, avec de nouveaux systèmes, destinés à préparer la génération actuelle d'enfants à une vie pleine dans le monde de demain. De celui-ci ils ne savent rien et ne peuvent en prévoir que vaguement la ligne générale. Certains se laissent aller au désespoir et s'évadent dans l'isolationnisme et l'attente, aussi philosophique que possible, de la libération apportée par la mort ; ils ne demandent qu'un peu de nourriture, de chaleur, quelques livres et de quoi se vêtir. Nombreux sont ceux qui refusent net de penser et remplissent plutôt leur vie d'œuvres de secours, se préoccupant des problèmes de la destitution et de la restitution et, selon leurs moyens, aident à la restauration. Tous éprouvent la réaction qui suit les conséquences tragiques de la guerre et sont étrangers au processus de la paix, car la paix ne leur a jamais été réellement familière et demeure évidemment lointaine encore.

Par-dessus tout, les hommes, dans tout le monde et par millions, manifestent une profonde misère spirituelle et sont conscients de l'inquiétude de l'esprit, qu'ils reconnaissent tel qu'il est. Ils peuvent exprimer cette misère sous bien des formes et utiliser des terminologies différentes. Peut-être cherchent-ils dans des directions diverses la satisfaction de leurs aspirations, mais partout existe l'exigence de valeurs plus vraies que celles responsables du passé et le désir de la manifestation de ces vertus, impulsions et élans spirituels que les hommes semblent avoir perdus et qui constituent la somme totale des forces poussant l'humanité vers la vie spirituelle.

Partout les gens sont prêts à accueillir la lumière. Ils attendent une nouvelle révélation et une nouvelle dispensation. L'humanité a avancé si loin dans la voie de l'évolution que ces exigences et cette attente ne s'expriment pas seulement en termes d'amélioration matérielle, mais aussi en termes de vision spirituelle, de valeurs réelles et de justes relations humaines. On veut l'enseignement et l'aide spirituels, en même temps que l'on demande le nécessaire en aliments, vêtements et occasions de travail et de vie libre. Devant la famine qui affecte de vastes surfaces du monde, la famine de l'âme s'exprime avec autant de désarroi.

La grande tragédie, toutefois, est que les gens ne savent de quel côté se tourner, ni quelle voix écouter. L'espoir est en eux, spirituel et immortel. Cet espoir et cette exigence ont atteint l'oreille attentive de Christ et de Ses disciples au lieu où ils vivent, agissent et veillent sur l'humanité. Par quel moyen ces forces de l'esprit travailleront-elles à la restauration du monde ? Par quelles méthodes les Guides spirituels de la race conduiront-ils les hommes vers plus de lumière et vers les perspectives offertes par l'Ere nouvelle ?
L'humanité regarde vers la Voie de la Résurrection. Qui la mènera sur cette Voie ?

Les religions organisées et les Eglises dans le monde entier reconnaîtront elles l'occasion et répondront-elles à l'appel du Christ et aux exigences spirituelles d'innombrables millions ? Ou n'œuvreront-elles que pour restaurer et organiser les églises ? Le coté administratif des religions mondiales comptera-t-il davantage dans la conscience des ecclésiastiques que le besoin du peuple d'une présentation simple de la vérité qui donne la vie ? L'intérêt et le pouvoir des Eglises s'appliqueront-ils à rebâtir des structures matérielles, à rétablir la sécurité financière, à recouvrer le statut de théologies périmées et à reconquérir puissance et prestige temporels ? Ou les Eglises auront-elles la vision et le courage de laisser tomber les mauvais usages anciens et d'adresser au peuple le message que Dieu est Amour, en prouvant l'existence de cet amour dans leurs propres existences et par leur simple et affectueux service ? Diront-ils au peuple que le Christ est vivant à jamais et lui commanderont-ils de détourner ses regards des vieilles doctrines de mort, de sang et d'apaisement de
Dieu pour les fixer sur la Source de toute vie et sur le Christ vivant ? Il est prêt à verser sur eux "cette vie plus abondante" qu'ils attendent depuis si longtemps et qu'Il leur a promis. Enseigneront-ils que la destruction des formes anciennes était nécessaire et que leur disparition est la garantie de la possibilité actuelle d'une vie spirituelle neuve et plus pleine ? Rappelleront-ils au peuple que le Christ Lui-même a dit qu'on ne peut mettre du vin nouveau dans de vieilles outres ? Les potentats de l'Eglise et le fier clergé renonceront-ils publiquement à leurs buts faux et matériels, leur argent et leurs palais et "vendant tout ce qu'ils possèdent", suivront-ils le Christ sur le sentier du service ? Ou, comme le jeune homme riche dont parle l'Evangile, se détourneront-ils tristement ? Dépenseront-ils les sommes dont ils disposent pour soulager la douleur, comme faisait le Christ, enseigneront-ils aux enfants les choses du Royaume de Dieu, comme a fait le Christ, en donnant l'exemple d'un cœur simple, d'une confiance joyeuse et d'une foi assurée en Dieu, comme le Christ ? Les ecclésiastiques de toutes les confessions, dans les deux hémisphères, accéderont-ils à cette lumière intérieure qui leur fera répandre la lumière et évoquera cette lumière supérieure qu'apportera certainement la nouvelle révélation attendue ? Le déplorable matérialisme qu'ont exprimé les Eglises et l'échec de leurs représentants dans la tâche d'enseigner correctement les fidèles peuvent-ils être effacés ? Il faut y voir les causes de la guerre mondiale 1914-1945. La guerre n'eût pas été possible si l'avidité, la haine et la séparativité n'avaient prédominé dans le cœur des hommes ; ces désastreux défauts s'y trouvaient parce que les valeurs spirituelles n'avaient point de place dans la vie du peuple, car depuis des siècles, elles n'avaient guère eu de place dans la vie des Eglises. La responsabilité en revient nettement aux Eglises.

Il s'agit ici d'abord de l'Eglise de Rome dans les divers pays du monde, et aussi des Eglises qui sont depuis longtemps des Eglises d'Etat, mais ont aujourd'hui perdu quelque peu de leur pouvoir. L'Eglise de Rome, comme une vaste pieuvre, plonge ses tentacules à ventouses dans tous les pays. Les deux principales organisations du monde actuel qui sont fondamentalement des parasites, dont la base est matérielle et la politique dangereuse, car leurs buts et leur influence sont internationaux, sont l'Eglise catholique romaine et le judaïsme orthodoxe. Ces deux puissants groupes sont réactionnaires, obsolètes dans leurs méthodes et leurs théologies, ainsi que dans leur attitude envers la vie moderne. Toutes deux devraient se convertir à une religion pure et sans tache. Ces deux groupes constituent plus que jamais une menace à l'égard de la paix du monde. Le mouvement politique sioniste et les combinaisons du Vatican n'ont pas de place dans la vie spirituelle de l'homme. Ils compromettent l'avancement de l'humanité vers une zone plus illuminée de vraie vie.

Ceci dit, je voudrais rappeler qu'il existe de remarquables et saints Juifs et de vénérables catholiques romains, semblables au Christ. Le Christ était Juif, saint François d'Assise était catholique romain ; l'un et l'autre étaient des modèles d'amour de Dieu, de service et de simplicité.

Telles sont les questions que doivent résoudre les Eglises organisées. Il y a dans les Eglises aujourd'hui des hommes qui sont sensibles au nouvel idéalisme spirituel, à l'urgence de la conjoncture et à la nécessité du changement. Mais les circonstances dépendent de gens réactionnaires. Les grands mouvements tendant à la réorganisation des églises qui se développent maintenant dans le monde dévasté, demeurent entre les mains des dignitaires des Eglises, des synodes et des conclaves. Les plans formés à présent à l'échelle internationale sembleraient indiquer que l'autorité reste confiée aux gens qui ne devraient pas la détenir. Pour chaque penseur avancé et clairvoyant dans ces groupes, nationaux ou internationaux, il y en a quatre ou cinq rétrogrades. Cette majorité réactionnaire cherche à restaurer les églises pour rétablir l'état préalable à la guerre et préserver les vieilles présentations théologiques. Ils rendent futiles et impuissants les efforts de la minorité du nouveau type d'ecclésiastique, doué d'une vision de l'Ere nouvelle et d'une interprétation neuve et moderne de la vérité. Retenu par le manque de ressources financières, un tel prêtre voit tous ses efforts annulés par le poids mort de la Hiérarchie ecclésiastique et le fondamentalisme réactionnaire des théologiens. La question qui se pose à l'homme vraiment spirituel est celle-ci : Resterai-je dans l'Eglise, où le sort m'a placé, pour y faire mon possible, ou dois-je quitter l'Eglise et travailler en dehors d'elle ?

Dans les Eglises protestantes, rien n'indique sur une vaste échelle un changement fondamental d'attitude à l'égard des enseignements théologiques pour le gouvernement de l'Eglise. Tout porte à croire que l'Eglise de Rome n'a rien appris spirituellement, aucun signe ne manifeste dans les grandes religions orientales qu'elles soient en tête du mouvement pour la production d'un monde nouveau et meilleur. Essentiellement, rien ne prouve que l'esprit de Christ, la simplicité de la vraie connaissance et la clarté de la pensée spirituelle soient en voie de conditionner les organisations religieuses de l'après-guerre. Et l'humanité attend toujours. L'humanité désire par-dessus tout l'assurance que Dieu est et qu'un Plan divin existe, un Plan accordé au système des choses et contenant à la fois de l'espoir et de la force. Les hommes veulent être convaincus que le Christ vit, que Celui qui Vient, Celui que tous attendent, arrivera et qu'Il ne sera ni chrétien, ni hindou, ni bouddhiste, mais qu'Il sera Tout à tous. Les hommes voudraient l'assurance qu'une grande révélation spirituelle est imminente, que rien ne peut l'arrêter et que devant eux s'étend un avenir spirituel, ainsi qu'un avenir matériel. Telle est la demande adressée aux Eglises et qui est aussi une occasion opportune.

La vérité se présente éternellement de façon nouvelle et si les hommes d'Eglise s'en remettent aux antiques symboles, ils sont condamnés. L'humanité n'en veut rien savoir. Le problème se pose à l'Eglise de s'assurer ce que c'est que le Christ a prévu pour ce nouveau monde qui émerge et quelles vérités doivent compenser une période de souffrance et de crise.