19. Comme il peut être vu ou connu, il est évident que le mental n'est pas la source de l'illumination.


 
Ce sutra et les deux suivants nous présentent une attitude typiquement orientale à l'égard d'un problème très ardu, et cette méthode de raisonnement n'est pas facile à saisir pour des esprits occidentaux. Dans les six écoles de philosophie hindoue, tout le problème concernant la source de la création et la nature du mental est disséqué, discuté et si complètement épuisé, que presque toutes les écoles modernes peuvent être considérées comme des excroissances ou résultats constituant la suite logique des diverses positions hindoues. La clé de la diversité des opinions sur ces deux points se trouve peut-être dans les six types entre lesquels se répartissent tous les êtres humains, le septième n'étant que la synthèse de tous, et cela inclusivement, mais non exclusivement.

Dans les Yoga Sutras, le mental est tout simplement relégué à l'état d'instrument, d'intermédiaire, de plaque sensible enregistrant soit ce qui se déverse en lui d'en haut, soit ce qui l'atteint d'en bas. Il n'a pas de personnalité à lui, ni vie ni lumière propres, sauf celles qui sont inhérentes à toute substance et se trouvent en conséquence dans tous les atomes qui constituent la substance mentale. Ceux-ci étant sur la même ligne évolutive que le reste de la nature inférieure, viennent grossir le flot des forces matérielles qui cherchent à retenir l'âme captive, et ils constituent la grande illusion.

Le mental peut donc être connu dans deux directions ; premièrement, il peut être connu, reconnu et vu par le penseur, l'âme sur son propre plan ; et secondement il peut être vu et connu en tant qu'un des véhicules de l'homme sur le plan physique. Pendant un temps très long l'homme devint ce avec quoi il s'identifiait, à l'exclusion de l'homme spirituel véritable, qui peut être connu, obéi et avec qui un contact peut être établi, une fois que le mental a été relégué à sa place normale en tant qu'instrument de connaissance.

On peut s'aider ici d'une analogie se rapportant au plan physique. L'œil est l'un des plus importants de nos sens, celui par lequel nous acquérons la connaissance, l'agent grâce auquel nous voyons. Cependant, nous ne commettons pas l'erreur de considérer que l'œil lui-même soit la source de la lumière et ce qui produit la révélation. Nous savons qu'il est un instrument réagissant à certaines vibrations lumineuses au moyen desquelles certaines informations concernant le plan physique sont transmises à notre cerveau, qui est la grande plaque sensible. A l'égard de l'âme, le mental fonctionne aussi comme un œil, ou une fenêtre par laquelle viennent les informations ; mais il n'est pas lui-même la source de la lumière ou de l'illumination.

Il est intéressant de noter ici que, lorsque le cerveau et le mental se coordonnèrent (comme ce fut le cas pour la première fois aux temps lémuriens), le sens de la vue se développa simultanément. Avec le cours de l'évolution, une coordination plus élevée intervint ; l'âme et le mental se mirent à l'unisson. Puis l'organe de la vision subtile (le troisième œil) commença à fonctionner ; au mental, au cerveau et aux yeux se substitua une autre triade : l'âme, le mental et le troisième œil. En conséquence, le cerveau n'est pas la source de l'illumination, mais devient conscient de la lumière de l'âme et de ce qu'elle révèle du domaine de l'âme. Le troisième œil, se développant simultanément, initie son possesseur aux secrets des domaines subtils des trois mondes, de sorte que l'illumination, l'information et la connaissance parviennent au cerveau de deux directions : de l'âme par la voie du mental, et des plans subtils des trois mondes par la voie du troisième œil. Il faut se souvenir ici que le troisième œil révèle en premier lieu la lumière qui se trouve au cœur de chaque forme de la manifestation divine.