Signification du Processus Initiatique

Avant d'aborder la question suivante concernant la fusion de la conscience du Maître avec celle de son disciple, je voudrais mentionner la signification des mots sur lesquels j'ai précédemment mis l'accent : "processus initiatique". J'ai traité longuement du thème de l'initiation dans plusieurs de mes ouvrages, et je me suis efforcé de présenter cette question de manière à montrer qu'elle s'insère dans le processus de l'évolution en tant que méthode normale et inévitable. L'initiation a si souvent été présentée comme une cérémonie, que j'ai cru nécessaire de contrebalancer vigoureusement cette signification erronée. Néanmoins, si vous voulez saisir ce que j'ai à dire, il vous faudra faire appel, dans toute sa mesure, à ce que vous pouvez posséder de compréhension éclairée.

L'initiation n'est une cérémonie que dans la mesure où il survient un point culminant dans le processus initiatique, où la conscience du disciple perçoit de manière frappante le personnel de la Hiérarchie et sa propre position par rapport à ce personnel. Il exprime cette réalisation – successivement et à une échelle de plus en plus grande – sous forme de grand cérémonial rythmique de révélation progressive, dans lequel lui, en tant que candidat, occupe le centre de la scène hiérarchique. Il en est véritablement ainsi (sous l'angle cérémoniel) lors des deux premières initiations, et par rapport au Christ en tant qu'initiateur. Après la troisième initiation, l'aspect cérémoniel diminue dans sa conscience car les initiations supérieures ne sont pas enregistrées par le mental (avec sa faculté de réduire la réalisation à une forme symbolique) et donc transmises au cerveau, mais elles atteignent le cerveau et sont enregistrées via l'antahkarana. Les résultats de l'expérience de l'expansion sont alors nettement de nature à ne pouvoir être réduits à des symboles, ou à des événements symboliques ; ils sont sans forme et demeurent dans la conscience supérieure.

Je ne prétends pas ici que les enseignements donnés dans le passé par les divers groupes d'occultistes, ou dans mon livre  Initiation humaine et solaire, soient erronés ou ne reflètent pas exactement ce que le candidat  croit avoir vu se produire.

Ce que je cherche à faire comprendre c'est que l'aspect cérémoniel est dû à la capacité qu'a le disciple de créer des formes-pensées et (ce qui est d'importance majeure) représente sa contribution à l'extériorisation future du processus initiatique dans ses premiers stades. Quand un nombre adéquat de disciples aura réussi à relier la Triade spirituelle à la personnalité pénétrée par l'âme, et opérer la "précipitation" occulte des énergies de la Monade par le moyen de l'antahkarana, alors la première et la deuxième initiation pourront prendre place sur terre sous forme de "cérémonies".

Les initiations supérieures ne peuvent pas être présentées de cette manière, mais se dérouleront sur le plan mental, par le moyen de symboles et non par les détails d'événements cérémoniels. Cette représentation symbolique sera maintenue pour la troisième, quatrième et cinquième initiation. Lorsque ces cinq grandes expansions seront accomplies, les initiations ne seront plus enregistrées comme des cérémonies réelles sur terre, ou comme des visualisations symboliques sur le plan mental. Il est difficile de trouver un mot ou une expression traduisant ce qui se passe ; ce que je trouve de plus proche de la vérité est : "l'existence d'illumination par la révélation". Vous noterez sous ce rapport que la cinquième initiation est appelée celle de la Révélation. Vous avez donc une succession de conséquences ou de résultats de réalisation spirituelle qui se présentent comme suit :

1.

Cérémonies effectives basées sur l'extériorisation.

Première Initiation – La Naissance.

Deuxième Initiation – Le Baptême.

2.

Représentation symbolique basée sur la visualisation spirituelle.

Troisième Initiation – La Transfiguration.

Quatrième Initiation – La Renonciation.

Cinquième Initiation – La Révélation.

3.

L'Illumination par la Révélation basée sur la Lumière vivante.

Sixième Initiation – Décision.

Septième Initiation – Résurrection.

Huitième Initiation – Transition.

Neuvième Initiation – Refus.

Il est évident que ces trois tentatives pour définir le processus d'initiation ne présentent que l'aspect de la forme extérieure ; chaque initiation a trois aspects, comme tout dans la nature, car l'initiation est un processus naturel. Il y a d'abord son aspect forme ; puis son aspect conscience ou âme ; et finalement, son aspect vie.

L'aspect forme couronne l'expérience et présente la compréhension qu'a le disciple du processus initiatique ; l'aspect conscience indique d'une manière mystérieuse le taux d'expansion du disciple ayant subi le processus ; l'aspect vie permet le contact extra planétaire, indiquant ainsi l'avenir possible et les processus ultimes d'identification. On pourrait ajouter que la  cérémonie effective admet le disciple comme membre à part entière de la fraternité hiérarchique ; que la représentation symbolique  lui indique la Voie conduisant à Shamballa, et que la révélation illuminée  présente à l'initié le pont entre notre plan physique cosmique et les mondes intérieurs, subjectifs et cosmiques. Cette entrée du pont (je parle en symboles) révèle l'existence de l'antahkarana cosmique, créé par le Seigneur du Monde et son groupe d'Exécutants.Cette information concernant le processus initiatique est de nature coordinatrice, et ne vous est utile que sous cet angle. Elle démontre la synthèse solaire sous-jacente qui est la structure fondamentale que j'ai exposée dans le  Traité sur le Feu Cosmique . Au-delà de cette implication, cette information ne vous est d'aucune utilité. Elle vous permet, néanmoins, de commencer à cultiver le sens ésotérique de synthèse.

Il est fait allusion à ces trois degrés d'appréciation ou de compréhension du processus initiatique, dans l'oeuvre maçonnique. L'aspect cérémoniel peut être relié aux degrés d'apprenti et de compagnon, auxquels s'ajoutent quelques degrés peu pratiqués qui sont des expansions de l'enseignement impliqué. Les initiations comprises par les mots "représentation symbolique" sont indiquées tout d'abord dans le sublime troisième degré, celui de maître Maçon, dans l'Arche Royale Sacrée et dans un ou deux degrés lui faisant suite. Les degrés supérieurs du Rite Ecossais constituent un effort vague et nébuleux pour placer devant les francs-maçons les expansions de conscience et de progrès dans la Lumière, dont on fait l'expérience lors des initiations supérieures suivantes – celles qui sont soumises au processus appelé illumination par la révélation.

Le Travail maçonnique est une tentative ancienne et louable pour conserver, sous forme de germe, la vérité spirituelle concernant l'initiation. En dépit de distorsions, de certaines pertes des anciens points de repère et d'une cristallisation déplorable, il contient la vérité et, à une date ultérieure (au début du siècle prochain), un groupe de francs-maçons éclairés vont refondre les rites, et adapter  les formes et formules actuelles de telle manière que les possibilités spirituelles, indiquées symboliquement, se dégageront avec une plus grande clarté et une puissance spirituelle approfondie. La forme future de la maçonnerie de l'âge nouveau reposera forcément sur la base d'un christianisme éclairé, interprété de manière nouvelle, qui sera de nature universelle et n'aura aucune relation avec la théologie.

Sa forme actuelle, reposant sur une base juive vieille de presque cinq mille ans, doit disparaître. Il doit en être ainsi, non parce qu'elle est juive, mais parce qu'elle est vieille et réactionnaire, et n'a pas suivi le passage du soleil autour du zodiaque.

Ce passage devrait symboliser l'évolution humaine, et c'est ce qu'il fait. Exactement comme le péché des enfants d'Israël dans le désert était un retour à une dispensation et à un rite religieux dépassés (la religion des hommes de l'ère du Taureau, symbolisée par leur prosternation et leur adoration du veau d'or), la maçonnerie d'aujourd'hui est prête à faire de même ; les coutumes et formes anciennes, logiques et justes dans la dispensation juive, sont maintenant désuètes et devraient être abrogées. Il est également vrai qu'en rejetant le Christ, en tant que Messie, la race juive est restée métaphoriquement et pratiquement dans le signe du Bélier ou du Bouc émissaire, Il lui faut encore passer (toujours symboliquement) dans le signe des Poissons et reconnaître son Messie lorsqu'Il reviendra dans le signe du Verseau.

Autrement, elle répéterait son péché ancien et son refus du processus d'évolution.

Examinons maintenant ce que signifie le processus initiatique pour le disciple cherchant à mener la vie de dualité que ce processus exige. Notez que je le nomme "processus", contrairement à la définition théosophique qui le considère comme la cérémonie couronnant une période d'entraînement.

Le processus initiatique est en réalité le résultat de l'activité de trois énergies :

1. L'énergie engendrée par le disciple qui s'efforce de servir l'humanité.

2. L'énergie mise à la disposition du disciple lorsqu'il réussit à construire l'antahkarana.

3. L'énergie de l'ashram hiérarchique dans lequel il est absorbé ou intégré.

Ce sont ces trois énergies, chacune avec son mode d'expression et chacune produisant des résultats spécifiques, qui mettent en oeuvre le processus initiatique. Ces énergies sont évoquées par le disciple lui-même ; leur force croissante et leur capacité de révélation dépendent surtout de la détermination du disciple, de son dessein, de sa volonté, de sa persévérance et de son intégrité spirituelle. C'est en comprenant le mot processus que le disciple découvre le vrai sens de l'affirmation occulte selon laquelle "avant qu'un homme ne puisse fouler le Sentier, il doit lui-même devenir ce Sentier". De plus en plus, le disciple découvre ce que c'est que de devenir un agent créateur, utilisant les facultés créatrices du mental et se conformant de façon croissante au Plan du Créateur, le Seigneur du Monde.

Les trois premières initiations concernent d'une façon des plus mystérieuses le travail créateur, et l'expression spirituelle chez l'être humain, du troisième aspect de la divinité, celui de l'activité intelligente. Les quatrième, cinquième et sixième initiations sont tout aussi nettement liées au deuxième aspect, celui d'amoursagesse, s'exprimant par des formes créées ; les septième, huitième et neuvième initiations sont "inspirées" de manière occulte par le premier aspect divin, celui de la Volonté. C'est donc seulement à la neuvième initiation que l'être humain est une expression vraie et  complète de la divinité ; il s'aperçoit alors qu'en lui-même tous les aspects divins sont rassemblés. Grâce à eux, il est en rapport, consciemment, créativement et constructivement, avec la conscience de Celui en qui nous avons la vie, le mouvement et l'être. Tout cela est le  résultat d'un processus et l'effet du dynamisme inhérent à toute forme de vie, du minuscule atome aux Grandes Vies qui sont à peine plus que des noms pour le disciple.

Le processus initiatique gouverne la vie de dualité du disciple de trois manières :

1. Il s'exprime par les résultats obtenus dans les trois mondes et par la preuve tangible et grandissante de zones de réalisation nettement définies.

2. Il se manifeste en tant qu'effets dans sa conscience sous forme d'une fusion croissante de l'âme et de la personnalité, ainsi que par le pouvoir croissant d'invoquer l'afflux de la lumière supérieure, par le moyen de l'antahkarana.

3. Il se révèle à la fois par la Triade spirituelle et par la personnalité pénétrée par l'âme, quand, dans l'union, elles prouvent la  vitalité de la nature divine

de l'Amour. Lorsque cette révélation envahit la conscience du disciple et conditionne la forme exprimant son service, elle le fait pénétrer dans cette zone mystérieuse de conscience divine que nous appelons le "Coeur de Dieu" ; c'est pour nous la correspondance planétaire au "Coeur du Soleil".

Le "Coeur de Dieu", c'est-à-dire de notre Logos planétaire et le Coeur du Soleil, c'est-à-dire du Logos solaire sont mystérieusement reliés, et c'est par cette relation soutenue qu'il devient possible aux êtres humains de pénétrer dans la Hiérarchie. N'oubliez pas que la Hiérarchie est l'expression de l'énergie de l'Amour. Cette relation leur permet finalement de quitter le plan physique cosmique, pour entrer sur le plan astral cosmique.

Chaque aspect divin a trois aspects subsidiaires ; sur notre planète et sur le plan physique cosmique, est révélé l'aspect inférieur de l'amour que nous appelons la Volonté-de-Bien. Pour l'humanité qui lutte sur le plan physique cosmique, nous subdivisons inconsciemment cette Volonté-de-bien en trois aspects ; c'est aujourd'hui seulement que nous commençons à les saisir, en tant que possibilités.

L'aspect inférieur, nous le nommons  bonne volonté, ne nous rendant guère compte de l'attitude qu'il établit en vue du but universel ; nous nommons le deuxième aspect vaguement  amour et espérons prouver que nous manifestons effectivement l'amour par notre affiliation à la Hiérarchie – nous nommons l'aspect supérieur volonté-de-bien et le laissons sans définition, car ce n'est en aucune façon possible, même pour les initiés de la cinquième initiation, de comprendre vraiment ce qu'est la nature et le dessein de la volonté-de-bien qui conditionne l'activité divine.

Dans les enseignements antérieurs l'accent était mis sur le  caractère, en tant que facteur déterminant si tel homme pouvait "prendre l'initiation" (c'était le terme employé), et ce fut encore une des présentations qui ont beaucoup trompé l'aspirant.

Le caractère  a une importance majeure, une importance tellement reconnue qu'il n'est pas nécessaire de s'y attarder. C'est le caractère qui, néanmoins, permet à l'homme de devenir un disciple ayant pour but d'entrer finalement dans l'ashram d'un Maître, et de passer alors par le processus d'initiation. C'est le caractère qui est à juste titre considéré comme la nécessité primordiale, lorsque l'homme quitte le Sentier de Probation pour entrer sur le Sentier du Disciple. Mais il est cependant encore bien loin de son but, et bien loin d'être accepté par un Maître en tant que disciple. On pourrait exprimer ainsi la vérité : Quand les yeux du disciple se sont écartés de lui-même, et que son action dans les trois mondes passe sous la domination spirituelle (ou est en voie d'y passer), il se trouve alors devant le fait qu'il va devenir un être véritablement mental, ayant son point focal de vie sur le niveau mental, où il est soumis à la domination de l'âme ; celle-ci devient ensuite l'agent de direction de l'homme sur le plan physique. Cela ne signifie pas que l'homme se préoccupe de rendre son mental inférieur concret actif, illuminé, et capable de diriger ; cela s'effectue progressivement et automatiquement par la pression des influences supérieures qui se déversent en lui et à travers lui. La tâche qui l'occupe est de prendre conscience des activités du mental supérieur ou abstrait, et de la raison pure qui gouverne et anime le plan bouddhique, lui-même sensible à l'impression de la Monade. Celui-ci doit devenir le point vers lequel regarde sa conscience mentale, et sur lequel son attention se focalise. C'est là qu'elle doit être polarisée, de même que la conscience de l'humanité ordinaire est aujourd'hui polarisée sur le plan de l'émotion et de l'activité astrale, mais se déplace rapidement vers le plan mental.

Ceci implique une double activité ; le mental inférieur devient un puissant facteur de direction des activités de service du disciple. Ces activités deviennent la motivation puissante et principale de sa vie, et sont la conséquence d'une fusion croissante de l'âme et de la personnalité, ce qui développe son sens de l'inclusivité.

L'inclusivité est la clé suprême de la compréhension de la conscience. En même temps, le mental supérieur exerce son impression sur le mental inférieur, et l'attire à lui, en une fusion supérieure.

Ce processus de développement crée certains points majeurs de fusions successives, ayant comme conséquence des points de tension. Ces points de tension (atteints consciemment) deviennent une énergie dynamique qui permet au disciple de "se maintenir dans la lumière et, dans cette lumière, de voir la plus grande Lumière". Au sein de cette Lumière il sait, voit, absorbe ce qui jusque là avait été obscur, secret et inconnu. C'est cela l'initiation.

Périodes de recherche, périodes de douleur, périodes de détachement, périodes de révélation produisant des points de fusion, des points de tension, des points de projection d'énergie – telle est l'histoire du Sentier de l'Initiation.

L'initiation est en vérité le nom donné à la révélation ou vision nouvelle qui attire le disciple toujours vers l'avant et vers la Lumière plus grande ; ce n'est pas quelque chose qui lui est donné. C'est un processus de reconnaissance de la  lumière, et d'utilisation de la lumière, afin de pénétrer dans une lumière toujours plus claire.

La progression allant d'une zone faiblement éclairée de la manifestation divine à une zone de gloire céleste est l'histoire du Sentier de l'Evolution.

Dans les Archives des Maîtres, il y a certaines Règles destinées aux Disciples, d'origine très ancienne. Parmi elles, il s'en trouve une si vieille et si abstruse que c'est seulement aujourd'hui qu'il est possible de la porter à l'attention de l'humanité, vu la plus grande perception mentale et spirituelle de l'aspirant moderne. On peut la traduire comme suit mais de manière inadéquate :

"La lumière est aperçue, petit point de lumière perçante. Elle est chaude et rouge. Elle se rapproche à mesure qu'elle révèle les choses telles qu'elles sont, les choses qui peuvent exister. Elle perce le troisième centre et écarte tout mirage et tout désir.

"Une lumière est vue par le moyen de la lumière inférieure – une lumière de chaleur. Elle perce jusqu'au coeur et, dans cette lumière toutes les formes sont pénétrées d'une lumière rutilante. Le monde des formes éclairées, reliées les unes aux autres par la lumière, est alors perçu. Cette lumière est bleue, et de nature flamboyante.

Entre la lumière chaude et rougeâtre et cette claire lumière, brûle une flamme ardente – flamme dans laquelle il faut pénétrer avant d'entrer dans la lumière bleue et de l'utiliser.

"Une autre lumière est alors perçue, une lumière claire et froide qui n'est pas la lumière mais l'obscurité dans sa pureté la plus pure – la Lumière de Dieu lui-même. Elle obscurcit tout ce qui n'est pas Elle ; toutes les formes s'évanouissent et cependant la totalité de la vie est là. Ce n'est pas la lumière telle que nous la connaissons. C'est la pure essence essentielle de cette Lumière qui se révèle par la lumière."

C'est à la seconde lumière que le Bouddha et le Christ faisaient allusion lorsqu'Ils disaient : "Je suis la lumière du Monde." C'est la Lumière de Dieu lui-même, le Seigneur des Mondes, où vivent, se meuvent et ont leur Etre, les Vies qui sont au sein du Conseil de Shamballa.

C'est la reconnaissance des diverses "lumières" sur le Sentier Illuminé qui indique que le pèlerin est prêt à l'initiation. L'initié entre dans la lumière, en un sens particulier ; elle pénètre sa nature selon son développement à n'importe quel point du temps et de l'espace ; elle lui permet d'entrer en contact et de voir ce qui jusque là n'était pas vu, et, sur la base du savoir nouvellement acquis, de diriger ses pas encore plus loin. Je ne parle pas ici en symboles. Chaque initiation assombrit puis plonge l'initié dans une lumière plus élevée. Chaque initiation permet au disciple de percevoir une zone de conscience divine jusque là inconnue mais qui, quand il s'est familiarisé avec elle, avec son phénomène unique, sa qualité vibratoire et ses interrelations, devient pour lui un champ normal d'expérience et d'activité. Ainsi, les "mondes des formes vivantes et les vies sans forme deviennent siennes." De nouveau, la dualité intervient dans sa perception mentale, car sa conscience va maintenant de la zone éclairée d'où il vient au point de tension ou d'initiation. Par le processus initiatique, il découvre une zone nouvelle et plus brillamment éclairée où il peut maintenant entrer. Ceci n'implique pas qu'il quitte le champ précédent d'activité où il a vécu et travaillé, mais signifie simplement que s'offrent à lui de nouveaux champs de responsabilités car – par son propre effort – il est devenu capable de voir plus de lumière, d'avancer dans une plus grande lumière, et de mieux prouver qu'auparavant ses capacités au sein d'une zone de possibilités largement accrue.

L'initiation est donc une constante fusion de lumières, dans lesquelles il pénètre progressivement, ce qui lui permet de voir plus loin, plus profondément et plus inclusivement. Comme le disait l'un des Maîtres : "La lumière doit entrer verticalement et être diffusée ou rayonner horizontalement." Cela crée une croix de service sur laquelle le disciple est suspendu jusqu'à ce que la Croix de Sanat Kumara lui soit révélée. Il sait alors pourquoi cette planète est – pour des raisons sages et adéquates – la planète de la détresse, de l'absence de passion et du détachement. Lorsqu'il le sait, il sait tout ce que peut lui dire et lui révéler notre vie planétaire. Il a transmué la connaissance en sagesse.

C'est au centre de cette croix de service que le point de fusion et le point de tension doivent se trouver. Le point de fusion est créé par la focalisation dynamique de tout le pouvoir, de tous les objectifs et désirs du disciple, sur le plan mental ; le point de tension est créé lorsque la puissance invocatoire de ce point focal devient capable d'évoquer une réponse de ce qui est invoqué. Pour l'aspirant moyen et pour le disciple, c'est ou bien l'âme ou bien la Triade spirituelle. La rencontre des deux énergies focalisées produit un point de tension. Les disciples ne doivent pas concentrer leur attention sur la production d'un point de tension. Ils doivent se souvenir de la vie d'activité double ; c'est-à-dire, celle qu'ils ont, à un moment donné quelconque de leur effort, et celle avec laquelle ils peuvent faire fusionner tout le développement acquis. La puissance de leur pensée dans le sens de cette double ligne produira automatiquement le point de tension par le moyen de la fusion des dualités appropriées. C'est par l'activité du mental inférieur que la fusion avec l'âme est engendrée avec des points successifs et intensifiés de tension ; c'est par l'activité établie entre le mental supérieur et le mental inférieur, que la fusion avec la Triade spirituelle devient possible, avec des points de tension survenant à de nombreux points du pont, l'antahkarana ; c'est par l'activité de la raison pure que la fusion avec la Hiérarchie devient possible, et c'est ce qui produit les points de tension que nous appelons Initiations. Il existe nécessairement des points de tension encore plus élevés, mais nous traitons actuellement de ceux qui sont appelés initiations.

La lumière pénétrera peut-être dans votre mental, à ce sujet, si vous gardez constamment à l'esprit la dualité essentielle de la manifestation elle-même : les pôles négatif et positif présents dans la conscience de toutes les formes. Le point acquis de fusion (résultat du travail et de l'effort actifs et positifs) est rendu négatif à ce qui est invoqué et, par ce moyen, un autre point positif de tension peut être obtenu. L'initiation – point majeur et dramatique de tension – suppose essentiellement la fusion des aspects négatif et positif. Voilà pourquoi, dans tous les processus initiatiques, c'est la volonté du disciple qui est active et qui produit tout d'abord une fusion puis (comme conséquence) l'apparition d'un point de tension.

Permettez-moi une illustration. Dans le travail de création de l'antahkarana, le disciple tout d'abord et autant que cela lui est possible, par le moyen d'un effort mental positif, se focalise sur le plan mental. La fusion de l'âme et de la personnalité est alors présente et résulte d'une activité positive. La qualité et la vibration de ce point focal positif sont alors rendues négatives à la vibration ou contact supérieur, qui est invoqué par  la puissance et la radiation existantes. La réponse du pôle opposé (si le disciple pouvait s'en rendre compte) est immédiate et, dans la mesure du possible, déterminée par le point de réalisation du disciple.

Cette activité invocatoire-évocatoire produit un point de tension – mais non encore un point de fusion avec le pôle positif. A partir de ce point de tension, le disciple travaille à la création de l'antahkarana ; cela engendrera finalement la fusion désirée entre la personnalité pénétrée par l'âme et la Triade spirituelle. Le même processus général dicte toutes les fusions désirées et produit ces points de tension qui sont le secret de toute croissance. Le disciple s'efforce consciemment de provoquer ces points de tension et de fusion.

Voilà les grandes lignes gouvernant le processus initiatique ; le travail que j'ai indiqué ici est exécuté par tous les initiés-disciples de tous degrés, et même par le Seigneur du Monde lui-même. A partir de son Haut Lieu, Il maintient le monde manifesté des énergies en état de fusion. Des points de tension surviennent successivement comme conséquence d'une réalisation divine croissante, au sein des formes d'activité intelligente, d'amour-sagesse et de volonté-de-bien. Ces points de tension varient selon le dessein divin et le problème initiatique individuel de Sanat Kumara lui-même qui se soumet à un processus initiatique cosmique. Un tel point de tension, d'une grandeur prodigieuse, est présent dans le monde d'aujourd'hui ; l'intention, qui sous-tend la réalisation de cette fusion et de cette tension, est de permettre à l'humanité (en tant que partie intégrante du corps divin de manifestation) de progresser dans une plus grande lumière et de s'approcher davantage du "coeur d'amour" qu'est la Hiérarchie. Alors – et cela se produit actuellement – la Hiérarchie se rapproche d'une fusion consciente avec l'humanité.

Le point de tension ainsi obtenu – qui n'est pas encore apparu – produira le royaume de Dieu sur terre sous sa forme exotérique.

Nous allons examiner maintenant une des fusions qui est moins importante, mais néanmoins essentielle, à laquelle le disciple doit parvenir, ce qui produira en conséquence dans sa vie un point ou des points de tension.