LA SOLUTION
Il devient évident que trouver la solution au problème des minorités, consiste essentiellement à trouver la solution de la grande hérésie de la séparativité. C'est d'une immense difficulté, non seulement du fait de la prédisposition naturelle de l'humanité en ce sens, mais aussi parce que l'humaine nature ne peut changer facilement, ni rapidement. En outre, ce changement et l'écrasement de l'esprit de séparativité doit se produire en un monde, plongé aujourd'hui au plus profond de la dépression, usé par la souffrance, rempli de méfiance et de la crainte et qui se doute à peine de ce qui est réellement nécessaire, n'étant guère capable que de crier à l'unisson : Que la paix nous soit donnée en notre temps !
Si un acte législatif donnait immédiatement aux minorités nègres les pleins droits constitutionnels, le problème demeurerait inchangé, car les cœurs et les esprits des hommes n'auraient pas été transformés et la solution demeurerait absolument superficielle. La Palestine a été donnée aux Juifs, et quoiqu'ils aient obtenu satisfaction, le sentiment antisémite, existant presque sans exception dans toutes les nations, reste exactement au même point qu'auparavant, et de plus, le sang coule en Palestine. En Inde, la solution peu élégante du partage a laissé les difficultés de base telles quelles. Le problème va bien plus loin qu'on ne l'estime généralement. Il est inhérent à la nature humaine et c'est le produit de siècles innombrables de croissance stimulée et d'éducation mal dirigé des masses. La guerre n'a pas résolu les nombreux différents : puissance de l'orgueil et des attitudes nationalistes, le péril des antagonismes raciaux, les querelles engendrées par des croyances religieuses opposées et les troubles causés par les blocs, les partis et les idéologies. Quoique les combats aient pris fin, une nation se dresse toujours contre une autre dans l'arène politique, un groupe contre un autre groupe et (au sein des nations) parti contre parti et homme contre homme. Ceux qui sont sages et voient loin, ceux qu'inspire un saint bon sens sans égoïsme, l'idéaliste et les hommes et femmes de bonne volonté, existent partout et luttent en commun pour trouver une solution, pour édifier une nouvelle structure mondiale dans le droit, l'ordre et la paix, qui garantira les justes relations humaines. Mais, à leur tour, ils constituent une petite minorité, en comparaison des vastes multitudes d'êtres humains peuplant la terre. Leur tâche est dure et, du point où ils doivent travailler, leur semble parfois présenter des difficultés presque insurmontables.
Certaines questions se posent inévitablement partout à l'esprit des gens de bonne volonté :
Les Grandes Puissances sont-elles capables d'agir sans égoïsme, dans l'intérêt des petites puissances et de l'humanité entière ?
Une politique ambitieuse et les divers impérialismes nationaux peuvent-ils prendre fin et être oubliés définitivement ?
Une politique mondiale peut-elle être instaurée, qui garantirait la justice pour tous, petits ou grands ?
L'opinion mondiale peut-elle agir assez fortement en faveur des intérêts des justes relations humaines pour lier les mains de ceux qui sont égoïstement agressifs et peut-elle garantir des chances à ceux qui n'en ont guère eu jusqu'à présent ?
L'espoir d'établir une ère de justes relations humaines au sein des nations, aussi bien que sur le plan international, est-il un rêve impossible, le temps passé à l'étudier est-il perdu, ou n'est-ce qu'un désir qu'on prend pour une réalité ?
Le but des justes relations humaines, des droits égaux et des mêmes chances pour tous, partout, représente-t-il un objectif entièrement réalisable pour lequel tous les hommes dotés de bonnes intentions peuvent travailler avec quelque espoir de succès ?
Quelles sont les premières mesures à prendre pour encourager ces justes efforts et pour leur assurer un fondement solide de bonne volonté mondiale ?
Comment l'opinion publique peut-elle être suffisamment intéressée, afin que les nombreuses mesures promouvant les justes relations humaines soient imposées aux législateurs et aux politiciens de tous pays ?
Que devraient faire les minorités, afin que droit soit fait a leurs justes demandes, sans susciter plus de différends et sans alimenter la flamme de la haine ?
Comment peut-on abolir les fortes lignes de démarcation entre races, nations, et groupes et les clivages qui existent partout, en agissant de telle manière, que l' "Humanité Une" émerge de l'arène des affaires mondiales ?
Comment peut-on développer la conscience de ce fait : que ce qui est bon pour une partie est bon pour l'ensemble, et que le bien suprême de l'unité dans le tout garantit le bien du tout ?
Ces questions, et bien d'autres, se posent et exigent une réponse. La réponse vient sous forme d'une platitude généralement acceptée, et malheureusement, elle fait l'effet d'une douche froide : Etablissez de justes relations humaines en développant l'esprit de bonne volonté ! Alors, et alors seulement nous aurons un monde en paix et prêt à s'avancer vers une ère nouvelle et meilleure. Quoiqu'une platitude soit, dans la majorité des cas, l'expression d'une vérité première, il est difficile, dans le cas particulier, de faire admettre aux gens qu'elle est réalisable. Néanmoins, et parce que c'est une vérité, elle s'avérera à la longue, non seulement dans l'esprit de quelques-uns ici et là, mais sur une vaste échelle, dans le monde entier. Les gens recherchent avidement ce qui est original et inattendu, dans l'attente d'un miracle et de Dieu (quelle que soit la représentation mentale qu'ils aient de Lui), qui agirait, les délivrerait de la responsabilité et ferait la besogne à leur place.
Ce n'est pas par de telles méthodes qu'avancent les hommes, ils n'apprennent rien et ne progressent pas en se délestant de leurs responsabilités.
Le miracle peut arriver, le beau et le surprenant se manifester, mais seulement lorsque les hommes ont créé l'ambiance nécessaire, les conditions voulues, et par leur remarquable accomplissement, ont donné la possibilité à une expression encore plus étonnante de se manifester. Nous ne pouvons avoir d'autre expression de la divinité, avant que l'homme ne se conduise plus conformément au divin qu'a présent. Nous n'aurons point de "retour du Christ", ni d'influence de la conscience christique descendant sur nous, jusqu'à ce qu'en chaque homme, le Christ s'éveille et soit plus agissant que maintenant.
Le Prince de la Paix, ou l'esprit de paix, ne feront point sentir la présence de la paix sur la terre jusqu'à ce que les intentions pacifiques des hommes, partout, aient changé l'aspect des affaires du monde. L'unité ne sera pas la caractéristique distinguant l'humanité, jusqu'à ce que les hommes eux-mêmes aient abattu les murs qui les séparent et supprimé les barrières entre races, entre nations, entre religions et entre hommes.
Le miracle, dans la situation actuelle, et la chance extraordinaire ainsi offerte, c'est que pour la première fois les hommes, à une échelle planétaire, s'aperçoivent du mal à éliminer. Partout on discute, on tire des plans. Il y a des réunions, des cercles de discussions, des conférences et des comités qui s'échelonnent, des vastes délibérations aux Nations unies jusqu'aux petites réunions tenues dans de lointains villages.
La beauté de la situation présente, c'est que, même dans la plus petite communauté, une expression pratique de ce qui est nécessaire à l'échelle mondiale est offerte aux habitants. Les différends dans les familles, entre églises, dans les municipalités, dans les villes, les nations, entre races, et les conflits internationaux demandent tous le même objectif et le même processus d'ajustement : l'établissement de justes relations humaines. La technique ou méthode de réaliser cela reste partout la même : l'usage de l'esprit de bonne volonté.
La bonne volonté est une expression mineure de l'amour véritable et c'est la plus facile à saisir. L'application de la bonne volonté aux problèmes que doit envisager l'humanité dirige l'intelligence dans des voies constructives. Là où est présente la bonne volonté, les murs de séparation et de malentendus s'écroulent. Il est nécessaire que les gens cessent – au moins pour un temps – de parler de l'amour, d'aimer leurs frères, et de l'usage de l'amour pour résoudre les problèmes, mais discutent plutôt sur un plan moins élevé et plus pratique, celui de la bonne volonté. Se servir du mot amour ne signifie rien, c'est presque devenu un sujet de dérision pour les sceptiques, les incrédules, les endurcis et les désillusionnés. Mais la bonne volonté garde son sens et peut être comprise par tous comme une force d'harmonie.
L'amour et la bonne intelligence suivront en temps utile l'expression pratique de la bonne volonté agissant dans tous les genres de relations humaines et comme mode de contact entre les groupes, les nations et leurs minorités, de nation à nation et aussi dans le domaine de la politique internationale et des religions. L'expression de l'amour véritable, comme facteur dans la vie de notre planète, est peut-être encore fort lointaine, mais la bonne volonté est une possibilité actuelle et organiser la bonne volonté est une nécessité impérieuse.
On parle aujourd'hui beaucoup de bonne volonté et le mot est d'un usage courant. L'intention de l'employer dans tous les domaines de la pensée humaine est réelle, ainsi que de l'appliquer à tous les problèmes humains. Des preuves existent qu'un réel effort se poursuit en ce moment pour faire de la bonne volonté un agent efficace dans les négociations de la paix et de la bonne intelligence mondiales et pour amener de justes relations humaines.
Une campagne menée immédiatement par tous les hommes de bonne volonté est de première nécessité partout, dans le monde entier, pour interpréter le sens de la bonne volonté, pour insister sur la nature pratique de son expression, pour réunir en un groupe efficace et actif tous les hommes et les femmes de bonne volonté du monde et pour le faire, non sous forme d'une super organisation, mais afin de convaincre les malheureux, ceux qui sont dans la détresse ou dans l'erreur, de l'immensité d'une aide intelligente, prête à les aider. Il leur faut aussi démontrer leur capacité de prêter main forte à tous ceux qui œuvrent et luttent pour inaugurer de justes relations humaines et leur prouver la puissance de l'opinion publique, si elle est informée et vivante (formée par des gens de bonne volonté) et sur laquelle ils peuvent s'appuyer.
Ainsi s'établira dans chaque nation, dans chaque ville et village, un noyau d'hommes de bonne volonté, avec une intelligence avertie, un bon sens pratique, la connaissance des problèmes mondiaux et la volonté de répandre la bonne volonté et de trouver les hommes du même sentiment dans leur milieu.
Le travail des hommes de bonne volonté est un travail d'éducation. Ils ne possèdent et ne recommandent aucun panacée pour remédier aux problèmes mondiaux, mais ils savent qu'un esprit de bonne volonté, surtout s'il est formé et mis en œuvre par la connaissance, peut produire une atmosphère ou une attitude, qui rendra possible la solution de ces problèmes. Quand des hommes de bonne volonté se rencontrent, quel que soit leur parti politique, leur pays ou leur religion, il n'est point de problèmes qu'ils ne puissent résoudre à la longue, et résoudre à la satisfaction des diverses parties impliquées. C'est la production d'une telle atmosphère et l'évocation d'une pareille attitude, qui constitue la tâche principale des hommes de bonne volonté et non de présenter une solution toute faite. Cet esprit de bonne volonté peut être présent, là même où des divergences fondamentales existent entre les parties. Mais c'est rarement le cas aujourd'hui. Il n'y a, par exemple, guère de bonne volonté dans l'atmosphère et l'attitude caractérisant les activités du parti sioniste actuellement. Il attise la haine et constitue une force nettement séparative et destructive, comme le prouve ses publications. Il existe un réel esprit de bonne volonté dans un bon nombre des discussions des Nations unies, sur des points délicats et difficiles, et cela se manifeste de façon croissante.
Il n'y a point de raison valable de croire que la croissance de la bonne volonté dans le monde sera nécessairement lente et graduelle. Le contraire peut être vrai si les hommes et les femmes d'aujourd'hui sentent en eux-mêmes une véritable bonne volonté et se délivrent d'idées préconçues, en s'approchant les uns des autres et en travaillant de concert à répandre la bonne volonté. Une personne pleine de préjugés, un fanatique religieux ou un nationaliste à tous crins ont de la difficulté à développer la bonne volonté en eux-mêmes. Ils peuvent y arriver, s'ils aiment assez leurs semblables et cherchent à leur laisser la liberté, mais il leur faudra d'abord discerner le coin sombre en eux-mêmes où se dresse un mur de séparativité, et le démanteler. Il leur faudra s'appliquer délibérément à développer la vraie bonne volonté (non la tolérance) envers l'objet de leur préjugé, envers l'homme d'une religion étrangère, ou envers la nation ou la race, à l'égard desquels il éprouve de l'animosité, ou qu'il méprise.
Un préjugé est la première pierre du mur de séparativité.
La bonne volonté est bien plus répandue dans le monde qu'on ne se l'imagine. Il faut simplement la découvrir, la cultiver et la mettre en œuvre. Elle ne doit toutefois pas être exploitée par des groupes travaillant à leurs propres fins, si honnêtes, corrects ou sincères soient-ils. En ce cas, elle serait détournée vers des buts partisans. Les hommes de bonne volonté se tiennent à égale distance de groupes opposés, lorsqu'ils existent, afin de créer un climat, où la discussion et le compromis deviennent heureusement possibles. Ils marchent constamment sur la noble voie du milieu, celle du Bouddha, qui se situe entre les couples de contraires, et droit en direction du cœur de Dieu. Ils foulent le "sentier étroit" de l'amour, dont parlait le Christ, et ils montrent qu'ils le foulent en exprimant le seul aspect de l'amour que l'humanité puisse comprendre à présent : la Bonne Volonté.
Quand la bonne volonté sera exprimée et organisée, reconnue et utilisée, les problèmes mondiaux, quels qu'ils puissent être, aboutiront à la longue à une solution. Quand la bonne volonté constituera un facteur véritable et actif dans les affaires humaines, nous passerons à une intelligence plus pleine et plus riche de la nature de l'amour et à une expression de quelque aspect supérieur de l'amour divin. Quand la bonne volonté sera répandue abondamment parmi les hommes, nous assisterons à l'établissement des justes relations humaines et un nouvel esprit de confiance, de bonne foi et de compréhension régnera dans l'humanité.
Les hommes et les femmes de bonne volonté existent dans chaque nation et dans toutes les parties du monde, par milliers. Il faut les trouver, les toucher, les mettre en contact les uns avec les autres. Qu'ils se mettent à l'œuvre pour créer une atmosphère correcte dans les affaires du monde et dans leurs propres communautés, qu'ils sachent, bien qu'associés, ils sont tout puissants et peuvent éduquer et influencer l'opinion publique tant et si bien, que l'attitude du monde à l'égard des problèmes mondiaux deviendra juste et correcte, conforme au plan divin. Qu'ils comprennent que les solutions des problèmes critiques, devant lesquels se trouve l'humanité au seuil de l'Ere nouvelle, ne seront pas procurées par le choix de quelque plan d'action, imposé au public à grand renfort de propagande et de publicité. Elles se présenteront en prêchant et en développant l'esprit de bonne volonté et ses résultats : une bonne atmosphère et une attitude saine, ainsi qu'un cœur plein de compréhension.
L'Ere chrétienne fut annoncée par une simple poignée d'hommes, les douze apôtres, les soixante-dix disciples et les cinq cents qui reçurent le message du
Christ. L'Ere nouvelle, durant laquelle le Christ "verra le travail de Son Ame et sera satisfait", est introduite par les centaines et les milliers d'hommes de bonne volonté à l'œuvre actuellement dans le monde, et qui peuvent devenir encore plus actifs, s'ils se reconnaissent, se liguent et s'organisent.