INSTRUCTIONS PERSONNELLES AUX DISCIPLES PAR LE TIBETAIN à I.A.P.
Juin 1938
Frère de longue date,
Ces dernières années ont été pour vous des années de tension, d'activité et de service, de discipline et de difficultés personnelles et de travail ardu, accompagnées d'un important bouleversement extérieur et intérieur. Vous vous en rendez compte. Si vous vous rendiez également compte que tout cela est reconnu du côté intérieur et que rien n'en apparaît comme activités inutiles ou pertes de temps, il est possible que cette idée vous réconforte et vous assiste.
Bien que vous compreniez peu ce fait, cette époque a été pour vous une période de libération et de délivrance.
J'observe vos progrès et votre travail depuis 1917. Ceci vous indiquera combien lentement nous travaillons, nous qui cherchons à aider et à guider nos chélas. C'est cependant en demeurant seuls que croissent tous les disciples, en cherchant leur voie et en découvrant leur propre ligne d'approche vers le centre d'où jaillit la lumière, et aussi en répondant assidûment, conscients de leur solitude, à l'appel du devoir et du service. Le temps est pourtant venu pour vous de pouvoir travailler avec une claire vision, dans une coopération plus étroite avec le Centre intérieur et en partant de lui, et dans une solitude moins grande. Vous faites maintenant partie de mon groupe de disciples ; ceux-ci, un groupe choisi de frères, se tiennent à vos côtés ; moi aussi, je cherche
délibérément à me faire connaître de vous et à me rapprocher de vous afin de mieux vous aider et vous comprendre. Mon Ashram et ceux d'entre vous qui y sont affiliés deviennent étroitement reliés les uns aux autres et ésotériquement ils ne forment qu'un seul groupe.
Je vous demande de comprendre que, dans le travail que nous projetons d'accomplir ensemble, nous travaillons avec une franchise totale, cherchant à ne rien nous cacher les uns des autres. Nous montrons ouvertement les succès, les échecs et les faiblesses, et nous les considérons à la claire lumière qui provient du Centre et en présence de tous. Telle est la méthode des groupes du Nouvel Age. L'impersonnalité la plus impartiale est notre but, car une telle attitude nous libère en vue d'un service plus profond.
Je communique avec vous, mon frère, comme avec un travailleur entraîné qui a prouvé sa volonté et sa capacité de servir et d'accomplir des sacrifices pour ses semblables. Notre objectif est de fonctionner comme groupe, consacrés à un travail en commun dans lequel toutes les personnalités sont immergées et où seule brille la lumière de l'âme. Dans cette lumière, vous recevrez la lumière sur vos problèmes et ceux qui surgissent en relation avec le groupe ou dans le champ de travail de votre choix. Il y a deux choses, seulement deux choses, sur lesquelles je voudrais attirer votre attention :
Lorsque vous travaillez, servez et que vous vous efforcez de vous entraîner, vous devez apprendre à aller vers les autres, leur offrant l'occasion de servir et d'aider dans le travail que vous vous efforcez d'accomplir, le degré de
leur inexpérience possible ou le nombre de leurs travers n'important pas.
Pensez-y et cherchez à travailler à notre manière car c'est ce que nous autres, les instructeurs et les guides du côté intérieur, devons toujours faire. Nous offrons les opportunités et vous devez également les offrir aux autres.
Ensuite, ne soyez pas accablé ou exagérément affligé par l'étendue de l'ignorance et le manque de développement des masses que vous voyez autour de vous. L'atmosphère psychique des régions dans lesquelles vous travaillez est particulière et des plus difficiles pour les disciples travaillant en liaison avec nous, les travailleurs de la Grande Loge Blanche. Elle offre moins de difficultés pour les chélas qui travaillent en liaison avec la Fraternité (une des branches de notre activité). Ces chélas cependant ne travaillent pas avec les gens cultivés, les pionniers de la race ou les aspirants qui pensent. Ils travaillent avec la qualité d'aspiration spirituelle que l'on trouve dans la foule, la masse, et non pas avec ou dans l'individu. Ils ne travaillent pas avec le genre de personnes que vous pouvez atteindre. Je mentionne cela car je connais le profond découragement qui vous assaille lorsque vous réagissez à l'impression psychique de la masse. Libérez-vous-en, étant assuré que la Grande Loge Blanche travaille pour les aspirants et que la Fraternité travaille avec les illettrés et les masses ignorantes. Tout cela ne constitue qu'une seule oeuvre mais elle est répartie entre divers groupes qui travaillent en étroite association.
Je ne vous assigne cette fois aucun travail spécial, car votre temps est entièrement pris par le service. Je vous suggère une méditation (...)
Janvier 1940
Mon Frère,
Je voudrais suggérer que votre plus grand danger à l'heure actuelle réside dans un mirage qui est le résultat de votre solitude. Certains des mirages qui se manifestent sont le résultat d'une vie spirituelle trop limitée et trop fermée et d'une introspection trop poussée. N'ayant personne à qui parler et vous trouvant trop loin de vos frères spirituels, vous êtes très seul ; vous trouvant dans la position de quelqu'un qui enseigne et qui donne, vous demeurez un peu isolé et vous vous êtes replié sur vous-même, peut-être exagérément même si c'était
inévitable, sur le plan de la personnalité. Le résultat est la création par vous d'une forme-pensée puissante d'aspirations, d'interprétation spirituelle et de buts et de desseins spirituels. Mais cela constitue une forme-pensée, mon frère, aussi élevée que soit sa nature, qui peut produire un mirage prononcé et la domination d'un mirage sous une forme ou sous une autre.
Il peut s'adresser à vous et conditionner votre état psychologique ; vous devriez en être conscient et vous tenir sur vos gardes ; vous devriez le reconnaître comme étant votre propre création, le conditionner et le dominer, et
non le contraire. Vous saurez, je pense, à quoi je me réfère.
Pour le bien du service que vous nous rendez d'une manière si efficace, libérez-vous de ce mirage. Apprenez à reconnaître que le temps est limité et que pour vous (comme pour vos condisciples et pour A.A.B.) seules doivent être accomplies les choses qui relèvent du service rendu au tout et qui sont déjà en marche. L'instauration de nouvelles entreprises, alors que le temps alloué pour compléter celles dont vous êtes responsable est déjà relativement bref, constitue un mirage représentant un handicap des plus considérables. Je vous remercie de ce que vous avez fait à notre service et je vous demande d'aller de l'avant selon les lignes que vous avez si fermement tracées.
Note : Ce disciple continue à lutter, dans une grande solitude, dans un pays latin, poursuivant le travail du Tibétain et le faisant de la manière la plus heureuse.