L'attitude pacifiste


Le second point que je désire aborder a trait aux arguments avancés par les pacifistes du monde. Tous les gens sincères et bons sont d'esprit pacifique et détestent la guerre. Ceci est un fait que l'idéaliste et le pacifiste de principe oublient souvent. De telles personnes nous disent que deux choses mauvaises n'en font pas une bonne ; que répondre au meurtre par le meurtre (ce qui est leur définition de la guerre) est un péché ; que la guerre est mauvaise (ce que personne ne nie) et qu'on ne doit pas y prendre part. Ils prétendent qu'entretenir des pensées de paix et d'amour peut redresser la situation et mettre fin à la guerre. De telles personnes, refusant le fait existant de la guerre, font habituellement peu de chose ou rien de concret pour redresser les erreurs responsables de la guerre et ils permettent que leur défense – personnelle, nationale et internationale – soit assurée par d'autres. La sincérité de ces personnes ne peut être mise en doute.
On doit se souvenir, en réfutant ces idées et en justifiant l'esprit combattant des démocraties chrétiennes, que c'est le motif qui compte. La guerre peut être, et elle est un meurtre généralisé, si le motif est mauvais. Elle peut être sacrifice et action juste, si le motif est bon. Tuer un homme, alors qu'il assassine un être sans défense, n'est pas considéré comme un meurtre. Le principe reste le même, qu'il s'agisse de tuer un individu en train d'assassiner ou de se battre contre une nation qui fait la guerre à des êtres sans défense. Les moyens matériels, que le mal emploie à des fins égoïstes, peuvent aussi être employés dans un but juste. La mort du corps physique est un mal moindre que le recul de la civilisation, que les entraves mises aux desseins divins de l'esprit humain, que la négation de tout enseignement spirituel et que l'asservissement du mental et de la liberté de l'homme. La guerre est toujours mauvaise, mais elle peut être le moindre de deux maux, comme c'est le cas aujourd'hui.
La guerre actuelle, si elle est menée à une conclusion victorieuse par la défaite des puissances totalitaires, constitue un mal beaucoup moins grand que la subjugation de nombreuses nations à la cupidité sans égale, aux procédés aberrants d'éducation, au défi à toutes les valeurs spirituelles reconnues, des puissances de l'Axe. Si les puissances totalitaires devaient gagner, cela entraînerait des années de désordre et de révolte ; le résultat de leur victoire serait un malheur indicible.
C'est, sans aucun doute, une vérité spirituelle indéniable que la pensée juste peut changer et sauver le monde, mais il est tout aussi vrai qu'il n'y a pas assez de gens capables de penser pour accomplir cette tache. Il n'y a pas non plus assez de temps pour la réaliser. Les pensées de paix sont surtout fondées sur un idéalisme opiniâtre, qui aime plus l'idéal que l'humanité. Elles sont basées aussi sur une peur non reconnue de la guerre, sur une inertie individuelle qui préfère le monde de rêve des pensées irréalisables, à la prise en charge de la responsabilité de la sécurité de l'humanité.
J'ai donc essayé de rendre claire brièvement la position du Nouveau groupe des serviteurs du monde, luttant pour les droits de l'homme, pour l'avenir spirituel de l'humanité et pour le nouvel ordre mondial. Ce que j'ai à dire maintenant se divise en quatre parties :
I. Le monde tel qu'il est aujourd'hui. La situation présente résulte de tendances passées, de pressions sous-jacentes et des décisions humaines.
II. Le nouvel ordre mondial. Il contrastera avec l'ordre ancien et avec le prétendu "ordre nouveau" des puissances totalitaires.
III. Quelques problèmes impliqués. Quatre problèmes mondiaux majeurs demandent à être discutés ; nous devons les examiner.
IV. La tâche de l'avenir. Nous parlerons de l'intermède précédant la fin de la guerre et ferons quelques suggestions quant à la future période de reconstruction.