7. Les activités de l'âme libérée sont affranchies des couples de contraires. Celles des autres gens sont de trois sortes.
Ce sutra présente l'enseignement se rapportant à la loi du karma, d'une façon strictement orientale et qui risque de plonger dans la confusion l'étudiant d'Occident. L'analyse de ce que signifient ces paroles et l'étude des commentaires qu'en a fait le grand instructeur Vyasa peuvent servir à en élucider le sens. Il faut aussi se rappeler que dans le quatrième livre, nous traitons des stades suprêmes de la conscience atteints par ceux qui ont observé les huit moyens du yoga et expérimenté les effets de la méditation, dont le détail a été donné dans le Livre III. Le yogi est dès lors un homme libre, affranchi des conditions se rapportant à la forme et centré dans sa conscience, hors des liens des trois mondes de l'entreprise humaine. Il a atteint le domaine de la pensée pure et peut garder sa conscience libre de toute contrainte et exempte de désir. En conséquence, bien qu'il formule des idées et puisse se livrer à de puissantes méditations, et bien qu'il puisse diriger et contrôler les "modifications du principe pensant", il ne crée pas de conditions susceptibles de le faire rétrograder dans le tourbillon de l'existence du plan inférieur. Il est délivré du karma et ne donne naissance à rien ; il n'existe donc pas d'effets qui puissent servir à l'attacher sur la roue de la renaissance.
Vyasa, dans son commentaire, indique que le karma (ou action) est de quatre sortes, se présentant à nous comme suit :
1.
Le type d'activité qui se rapporte au mal, qui est méchante et dépravée.
Celle ci est appelée noire. Ce genre d'action est le produit de la plus profonde ignorance, de la matérialité la plus dense ou d'un choix délibéré. Lorsqu'elle est le résultat de l'ignorance, le développement de la connaissance suscitera graduellement un état de conscience qui ne connaît plus ce type de karma. Dans le cas où la matérialité dense produit ce que nous nommons l'action erronée, le développement graduel de la conscience spirituelle changera les ténèbres en lumière et le karma sera, là aussi, écarté. Cependant, lorsqu'il est le résultat d'un choix délibéré ou d'une préférence pour l'action erronée en dépit de la connaissance et au mépris de la voix de la nature spirituelle, ce type de karma conduit alors à ce que l'occultiste oriental nommait "avitchi", ou la huitième sphère, terme synonyme de l'idée chrétienne se rapportant à l'état consistant à être une âme perdue. Ces cas sont cependant extrêmement rares ; ils concernent le sentier de gauche et la pratique de la magie noire. Bien que cette condition implique une rupture avec le principe supérieur (entre l'esprit pur et ses deux expressions, l'âme et le corps, ou ses six principes inférieurs), la vie cependant demeure et, après la destruction de l'âme en avitchi, un autre cycle de devenir se présente à nouveau.
2.
Le type d'une activité qui n'est ni bonne ni mauvaise et qu'on qualifie de noire et blanche. Elle concerne l'activité karmique de l'homme moyen, que dominent les couples de contraires et dont la vie expérimentale est caractérisée par des oscillations d'avant en arrière entre ce qui est bon, inoffensif et résultant de l'amour, et ce qui est dur, malfaisant et résultant de la haine. Vyasa dit :
"Le noir et blanc est le produit de moyens extérieurs car, dans ce cas, le véhicule des actions croît par la souffrance causée à autrui ou de l'action bienveillante à son égard."
Il est donc clair que la croissance de l'unité humaine et l'ensemble de ses accomplissements, dépendent de son attitude à l'égard d'autrui et de l'action qu'elle exerce sur eux. C'est ainsi que se produit le retour à la conscience de groupe et que le karma est ou constitué ou liquidé.
C'est ainsi également que les oscillations du pendule entre ces couples de contraires se régularisent graduellement, jusqu'au moment où, le point d'équilibre étant atteint, l'homme agit correctement en vertu de la loi d'amour de l'âme, prend d'en haut les leviers de commande et n'est plus soumis aux oscillations vers la droite ou la gauche, au gré de l'attraction qu'exerce sur lui le bon ou le mauvais désir.
3.
Le type d'activité appelée activité blanche ; c'est le type de la pensée et du travail vivants, que pratiquent l'aspirant et le disciple. Elle caractérise le stade qui, sur le Sentier, précède la libération.
Vyasa l'explique comme suit :
"Le blanc est le fait de ceux qui recourent aux moyens d'amélioration, d'étude et de méditation.
Ceci, dépendant uniquement du mental et non de moyens extérieurs, ne résulte donc pas d'un tort causé à autrui."
Il est maintenant évident que ces trois types de karma se rapportent directement :
a. Au plan de la matérialité Le plan physique.
b. Au plan des couples de Le plan astral. contraires
c. Au plan de la pensée concentrée Le plan mental.
Ceux dont le karma est blanc sont ceux qui, ayant progressé dans la réalisation de l'équilibre des couples de contraires, sont maintenant engagés en un processus conscient et intelligent de leur propre être, pour s'émanciper hors des trois mondes. Ils y arrivent par :
a.
L'étude, ou le développement mental, étayé sur leur estimation de la loi d'évolution et la compréhension de la nature de la conscience ainsi que de sa relation avec la matière d'une part et avec l'esprit d'autre part.
b.
La méditation ou contrôle du mental, et par là, la création du mécanisme qui restitue à l'âme la maîtrise des véhicules inférieurs et rend possible la révélation du domaine de l'âme.
c.
La non-offense. Aucun mot, aucune pensée ou action ne cause du tort à une forme quelconque à travers laquelle s'exprime la vie de Dieu.
d.
Le dernier type de karma est décrit comme n'étant ni noir ni blanc.
Aucun karma d'aucune sorte n'est engendré ; aucun effet n'est mis en jeu par des causes déclenchées par le yogi et pouvant servir à le retenir du côté forme de la manifestation. Agissant, comme il le fait, du point de vue du non-attachement, ne désirant rien pour lui-même, son karma est nul, et de ses actes, ne résultent pour lui aucun effet.