MOYEN II. LES REGLES

 
32. La purification interne et externe, le contentement, l'ardente aspiration, la lecture spirituelle et la dévotion à Ishvara constituent nijama (ou les cinq règles).

Ainsi qu'il est dit plus haut, ces cinq règles régissent la vie du soi personnel inférieur et forment la base du caractère. Les pratiques de Yoga intéressent fort le penseur et l'aspirant occidental et le séduisent par l'aisance apparente de leur exécution et l'ampleur de leur rétribution (tel le développement psychique) ; mais elles ne sont pas autorisées par le véritable gourou ou instructeur, avant que yama ou nijama aient été instaurés en tant que facteurs déterminants de la vie quotidienne du disciple. Les commandements et les règles doivent d'abord être observés par lui ; lorsque sa conduite extérieure à l'égard de ses semblables, et la discipline intérieure régissant sa vie, sont alignées sur ces exigences, il peut alors se tourner en toute sécurité vers les formes et rituels du Yoga pratique ; mais pas avant.

C'est la méconnaissance de ce fait qui provoque en Occident tant de trouble parmi les étudiants du yoga. Le travail de l'occultisme oriental n'a pas de base plus favorable que la stricte adhésion aux exigences formulées par le Maître de tous les Maîtres dans le Sermon sur la Montagne. Quant au chrétien qui a réalisé la discipline du soi et s'est consacré à la pureté de la vie et au service désintéressé, il peut s'adonner à la pratique du Yoga plus sûrement que son frère plus attaché aux choses du monde, et plus égoïste bien qu'intellectuel ; il ne courra pas les risques qu'assume ce frère non préparé.

Les mots "pureté interne et externe" se rapportent aux trois enveloppes qui voilent le soi ; ils doivent être interprétés en un double sens. Chaque enveloppe a sa forme plus dense et plus tangible, et celle-ci doit être tenue propre ; car, dans un certain sens, les corps astral et mental peuvent être nettoyés, afin d'éliminer les impuretés provenant de leur entourage, tout comme le corps physique doit l'être pour se débarrasser d'impuretés similaires. Les matériaux plus subtils de ces corps doivent être également purifiés et c'est là la base de l'étude concernant la pureté magnétique, dont découle en Orient l'observation de tant de traditions qui paraissent inexplicables à l'Occidental.

L'ombre d'un étranger, projetée sur de la nourriture, produit des conditions d'impureté. Ceci se base sur la croyance que certains types d'émanations de force produisent des conditions impures ; et, bien que la méthode employée pour neutraliser ces conditions puisse avoir une saveur de ritualisme désuet, l'idée qui gît derrière cette tradition reste néanmoins toujours vraie. On connaît encore si peu de chose au sujet des émanations de force provenant de l'être humain ou agissant sur le mécanisme humain, que ce qu'on pourrait appeler la "purification scientifique" en est encore à son enfance.

Le contentement provoque des conditions dans lesquelles le mental est au repos ; il se base sur la récognition des lois qui régissent la vie et tout d'abord la loi du karma. Il produit un état d'esprit où toutes les conditions sont considérées comme correctes et justes et comme étant les meilleures dans lesquelles puisse se trouver l'aspirant pour résoudre ses problèmes et atteindre le but dans quelque vie que ce soit. Cela n'implique pas une immobilisation et une satisfaction productrice d'inertie ; il s'agit de reconnaître les avantages présents et de se prévaloir des occasions qui s'offrent, en les laissant offrir un arrière-plan et une base en vue de l'ensemble des progrès à venir. Ceci étant correctement accompli, les trois règles qui restent peuvent être observées plus aisément.

L'aspiration ardente sera plus amplement considérée dans le livre suivant ; mais il convient de souligner ici que cette qualité d' "aller au-devant" de l'idéal ou de s'efforcer d'atteindre l'objectif, doit être, chez l'aspirant au yoga, si profondément ancrée qu'aucune difficulté ne puisse l'en détourner. Ce n'est que lorsque cette qualité a été développée et démontrée, et lorsqu'il s'avère qu'aucun problème, aucune trace d'obscurité et aucun élément temporel ne puisse y faire obstacle, que l'homme est autorisé à devenir le disciple de l'un ou l'autre des Maîtres. Un effort ardent, une aspiration persistante et fermement maintenue, ainsi qu'une fidélité sans défaillance à l'idéal contemplé, sont les conditions sine qua non de l'état de disciple. Ces caractéristiques doivent se rencontrer dans chacun des trois corps et conduire à l'exercice constant d'une discipline s'appliquant au véhicule physique, à l'orientation continuelle de la nature émotive, et à une attitude mentale rendant l'homme apte à "tenir toutes choses pour perdues", s'il peut seulement atteindre son but.

La lecture spirituelle. On verra qu'elle concerne le développement du sens des réalités subjectives. Elle est favorisée par l'étude, comprise en sa signification physique, et par l'effort pour saisir les pensées contenues dans les mots. Elle se développe au moyen d'un examen minutieux des causes qui résident derrière tous les désirs, aspirations et sentiments, et se relie par là au plan du désir, ou plan astral. Elle a affaire à la lecture des symboles ou formes géométriques enrobant l'âme d'une idée ou d'une pensée, ce qui concerne le plan mental. Il en sera question plus tard, dans le Livre III.

La dévotion à Ishvara peut être brièvement définie comme constituant l'attitude du soi inférieur triple au service de l'égo, le souverain intime, le Dieu ou Christ intérieur. La manifestation en sera triple et mènera le soi personnel inférieur à une vie d'obédience au Maître qui siège dans le cœur ; ceci, en définitive, conduira l'aspirant dans le groupe de quelque adepte ou instructeur spirituel, et l'amènera également à se consacrer avec dévotion au service d'Ishvara, ou divin Soi, tel qu'Il se trouve dans le cœur de tous les hommes et derrière toutes les formes de la manifestation divine.