16. On peut se garder de la douleur qui est encore à venir.
Les mots sanscrits transmettent ici une double idée. Ils impliquent en tout premier lieu la possibilité d'éviter l'imminente "détresse" (selon le terme de quelques traductions) par un ajustement correct des énergies de l'homme ; de sorte que, grâce à son changement d'attitude mentale, les réactions douloureuses ne sont plus possibles, la transmutation de ses désirs rendant également impossibles les "douleurs" anciennes. Ils signifient en second lieu que la vie présente sera vécue de telle sorte que nulle cause susceptible de produire des effets douloureux ne sera mise en jeu. Cette double conjoncture provoquera dans la vie du yogi une double discipline, comprenant la ferme décision de pratiquer le non-attachement, ainsi qu'une stricte réglementation de la nature inférieure. Il s'ensuivra une activité mentale dont le caractère aura pour résultat d'enlever tout attrait aux anciens désirs, tendances et convoitises, et de faire disparaître tout entraînement à des activités pouvant produire du karma ou des résultats ultérieurs.
Ce qui est du passé ne peut être liquidé que dans le présent et le type de karma entraînant à sa suite la douleur, le chagrin et la détresse, doit être laissé libre de suivre son cours. Le karma du présent, ou précipitation des effets que l'égo entend liquider au cours du cycle actuel de sa vie, doit également jouer son rôle dans l'émancipation de l'âme. L'homme spirituel a cependant la possibilité de diriger l'homme intérieur de telle sorte que les événements karmiques (ou les effets du karma tels qu'ils se manifestent dans le monde physique objectif) ne puissent causer ni douleur ni détresse, lorsqu'ils seront constatés et subis par le yogi ayant réalisé le détachement ; pas plus que ne pourront entrer en jeu des causes génératrices de douleur.