La nature de l'Antahkarana

L'une des difficultés liées à cette étude de l'antahkarana est le fait que, jusqu'ici, le travail fait sur l'antahkarana a été entièrement inconscient.

En conséquence, dans le mental humain, le concept concernant cette forme de travail créateur et cette construction du pont, ne rencontre au début que peu de réaction de la nature mentale ; de plus, afin d'exprimer ces idées, il nous faut pratiquement créer une nouvelle terminologie, car il n'existe pas de mots propres à définir ce que nous voulons dire. De même que les sciences modernes ont créé leur propre terminologie, nouvelle et complète, au cours des quarante dernières années, de même cette science doit créer son propre vocabulaire. En attendant, il nous faut faire de notre mieux avec les mots dont nous disposons.

Le deuxième point que je souhaite traiter consiste à demander aux étudiants de cette discipline de se rendre compte que, avec le temps, ils arriveront à comprendre, mais qu'actuellement tout ce qu'ils peuvent faire est de s'en remettre à la tendance inaltérable de la nature subconsciente à remonter à la surface de la conscience, selon une activité réflexe en vue d'établir la continuité de conscience. Cette activité réflexe de la nature inférieure correspond au développement de la continuité entre la super-conscience et la conscience qui se développe sur le Sentier du Disciple. 

Tout ceci fait partie – en trois stades – du processus d'intégration, prouvant au disciple que la vie dans son ensemble (en termes de conscience) est une vie de révélation. Réfléchissez à ceci.

Une autre des difficultés rencontrées dans l'examen de n'importe laquelle de ces sciences ésotériques, traitant de ce qui a été appelé "le développement conscient des reconnaissances divines" (qui est la vraie prise de conscience) est la vieille habitude qu'a l'humanité de matérialiser toute connaissance. Tout ce que l'homme apprend est appliqué – au fil des siècles – au monde des phénomènes naturels et au processus naturel, non à la reconnaissance du Soi, du Connaissant, du Spectateur, de l'Observateur. En conséquence, quand l'homme entre sur le Sentier, il doit s'éduquer à la méthode consistant à utiliser la connaissance par rapport à l'Identité consciente d'elle-même, à l'Individu contenu en soi-même, se créant soi même.

Quand il est capable de le faire, il transmue la connaissance en sagesse.Auparavant, j'ai parlé de "connaissance-sagesse" qui sont des mots synonymes de "force-énergie".

La connaissance utilisée est la force qui s'exprime ; la sagesse utilisée est l'énergie en action. Les mots sont l'expression d'une grande loi spirituelle que vous feriez bien d'étudier soigneusement. La connaissance-force concerne la personnalité et le monde des valeurs matérielles ; la sagesse-énergie s'exprime par le fil de conscience et le fil créateur, constituant un cordon au tissage double. Pour le disciple, ils représentent la fusion du passé (fil de conscience) et du présent (fil créateur), et forment ensemble ce que sur le Sentier de Retour, on appelle habituellement l'antahkarana. Ceci n'est pas entièrement exact. Le fil de sagesse-énergie est le sutratma ou fil de vie, car le  sutratma (lorsqu'il est fondu au fil de conscience) s'appelle aussi  l'antahkarana. Je pourrais peut-être clarifier quelque peu cette question en signalant que, bien que ces fils existent éternellement dans le temps et l'espace, ils apparaissent distincts et séparés lorsque l'homme devient un disciple en probation, et qu'il prend donc conscience de lui-même, et non seulement du non-soi. Il y a le fil de vie ou sutratma et le fil de conscience – l'un ancré dans le coeur, l'autre dans la tête. Au cours des siècles passés, le fil créateur, sous l'un ou l'autre de ses trois aspects, a été lentement tissé par l'homme ; ce fait de la nature est indiqué par son activité créatrice pendant les 200 dernières années, de sorte qu'aujourd'hui le fil créateur est généralement une unité en ce qui concerne l'humanité dans son ensemble, et spécifiquement le disciple ; il forme un fil robuste étroitement tissé sur le plan mental.

Ces trois fils majeurs qui, en réalité, sont six, si l'on différencie le fil créateur en ses parties composantes, forment l'antahkarana. Ils incarnent l'expérience passée et présente et sont reconnus par l'aspirant. Ce n'est que sur le Sentier lui-même que l'expression "construire l'antahkarana" devient exacte et appropriée. C'est sur ce point que la confusion peut intervenir dans le mental de l'étudiant. Appeler ce courant d'énergie, le sutratma et un autre courant, le fil de conscience et un troisième courant d'énergie, le fil créateur est une distinction purement arbitraire du mental analytique inférieur. Il l'oublie. Tous trois ensemble sont essentiellement l'antahkarana en voie de formation. Il est également arbitraire d'appeler antahkarana le pont que le disciple construit à partir du plan mental inférieur, via le plan égoïque, tourbillon central de force. Mais, aux fins d'une étude compréhensive et d'expérience pratique,  nous définirons l'antahkarana comme le prolongement du fil triple  (jusque là tissé inconsciemment par l'expérimentation dans la vie et la réceptivité de la conscience à l'environnement)  obtenu en projetant consciemment les trois énergies unies de la personnalité, sous l'impulsion de l'âme, par-dessus la discontinuité qui jusque là existait dans la conscience. Deux événements peuvent alors se produire :

1. La réponse magnétique de la Triade spirituelle (atma, buddhi, manas), qui est l'expression de la Monade, est évoquée. Un courant triple d'énergie spirituelle est lentement projeté vers le lotus égoïque et vers l'homme inférieur.

2. La personnalité commence alors à jeter un pont par-dessus le hiatus existant de son côté entre l'atome manasique permanent et l'unité mentale, entre le mental supérieur abstrait et le mental inférieur.

Techniquement et sur le Sentier du Disciple, ce pont, entre la personnalité sous ses trois aspects et la monade sous ses trois aspects, s'appelle l'antahkarana.

Cet antahkarana est le résultat de l'effort uni de l'âme et de la personnalité, travaillant  ensemble consciemment à construire ce pont. Lorsqu'il est terminé, il existe un rapport parfait entre la monade et son expression sur le plan physique, l'initié dans le monde extérieur. La troisième initiation marque la consommation de ce processus, et il y a alors une ligne directe de relation entre la monade et le soi inférieur. La quatrième initiation marque, chez l'initié, la parfaite compréhension de cette relation. Cela lui permet de dire "Le Père et moi sommes  un." C'est pour cette raison que la crucifixion ou Grande Renonciation prend place.

N'oubliez pas que c'est l'âme qui est crucifiée. C'est le Christ qui "meurt". Ce n'est pas l'homme ; ce n'est pas Jésus. Le corps causal disparaît. L'homme est conscient monadiquement. Le corps de l'âme ne joue plus de rôle utile et n'est plus nécessaire.

Il ne reste rien que le sutratma, caractérisé par la conscience, laquelle continue de garder son identité bien qu'elle soit fondue dans le tout. Une autre caractéristique est la créativité, ainsi la conscience peut se focaliser à volonté sur le plan physique, dans un corps extérieur, ou forme. Ce corps est créé par la volonté du Maître.

Dans cette tâche d'épanouissement, d'évolution et de développement, le mental de l'homme doit comprendre, analyser, formuler et distinguer ; en conséquence, les différenciations temporaires sont d'importance profonde et utile. Nous pourrions donc conclure que la tâche du disciple est :

1. De prendre conscience des situations suivantes (si je puis employer un tel mot) :

a. Du processus combiné à la force.

b. De la position sur le Sentier, ou reconnaissance des agents de qualification disponibles, ou énergies.

c. De la fusion ou intégration du fil de conscience avec le fil créateur et le fil de vie.

d. De l'activité créatrice. Elle est essentielle car ce n'est pas seulement par le développement de la capacité de créer dans les trois mondes qu'est créé le nécessaire point focal, mais elle conduit aussi à la construction de l'antahkarana, à sa "création".

2. A construire l'antahkarana entre la Triade spirituelle et la personnalité, avec la coopération de l'âme. Ces trois points d'énergie divine pourraient être symbolisés ainsi :

construire l'antahkarana

Ce simple symbole vous donne l'image de la tâche du disciple sur le Sentier.

Un autre diagramme peut servir de clarification :

tâche du disciple sur le

Vous avez ci-dessus les "neuf de l'initiation" ou la transmutation de neuf forces en énergies divines.

Le Pont entre les Trois Aspects du Mental

Il est un point que je désire éclaircir si je le peux, car ce point est très confus dans le mental de l'étudiant ; il en est forcément ainsi.

Considérons donc un instant le point exact où se trouve l'aspirant lorsqu'il commence à construire consciemment l'antahkarana. Il a derrière lui une longue série d'existences dont l'expérience l'a amené au point où il est apte à évaluer consciemment sa condition, et à arriver à une certaine compréhension de son point d'évolution. Il peut donc entreprendre – en coopération avec sa conscience qui s'éveille et se focalise constamment – de franchir l'étape suivante qui est celle du disciple accepté. Dans le présent, il est orienté vers l'âme ; par la méditation et l'expérience mystique, il a des contacts intermittents avec l'âme, qui deviennent de plus en plus fréquents. Il devient quelque peu créateur sur le plan physique, à la fois dans sa pensée et dans ses actes ; parfois, même si c'est rare, il a une expérience intuitive authentique. Cette expérience intuitive sert à ancrer le "premier fil ténu filé par le Tisserand dans l'entreprise fohatique", selon les termes de l' Ancien Commentaire. C'est le premier câble projeté par la Triade spirituelle en réponse à l'expression de la personnalité, et c'est le résultat du pouvoir magnétique grandissant de ces deux aspects de la Monade en manifestation.

Il vous apparaîtra évident que, lorsque la personnalité est magnétisée de manière adéquate sous l'angle spirituel, sa note ou son se fera entendre et suscitera une réponse de l'âme sur son propre plan. Plus tard, la note de la personnalité et celle de l'âme, étant à l'unisson, produiront un effet de nette attraction sur la Triade spirituelle. Cette Triade spirituelle, par ailleurs, a exercé un effet magnétique croissant sur la personnalité. Cela commence au moment du premier contact conscient avec l'âme. A ce stade de début, la réponse de la Triade est nécessairement transmise via le sutratma et produit inévitablement l'éveil du centre de la tête. C'est pourquoi la doctrine du coeur commence à supplanter la doctrine de l'oeil. La doctrine du coeur gouverne le développement occulte ; la doctrine de l'oeil – doctrine de l'oeil de la vision – gouverne l'expérience mystique.

La doctrine du coeur est basée sur la nature universelle de l'âme, conditionnée par la Monade, l'Unique, et implique la réalité ; la doctrine de l'oeil est basée sur la relation entre l'âme et la personnalité. Elle implique les relations spirituelles, mais l'attitude de dualisme, de reconnaissance des opposés polaires, y est implicite. Voilà des points importants dont il faut se souvenir alors que cette science nouvelle est en voie d'être plus largement connue.

L'aspirant en arrive finalement au point où les trois fils – de vie, de conscience et de créativité – sont focalisés, reconnus comme des courants d'énergie, et utilisés délibérément par le disciple, sur le plan mental inférieur. En termes ésotériques "Il se tient sur ce plan et, regardant vers le haut, il voit une terre promise, terre de beauté, d'amour et de vision future."

Mais il y a un  hiatus dans la conscience, bien qu'en fait, il n'existe pas. Le fil d'énergie du sutratma jette un pont par-dessus ce hiatus et relie monade, âme et personnalité de manière ténue. Mais le fil de conscience ne s'étend que de l'âme à la personnalité, dans le sens involutif. Sous l'angle évolutif (pour utiliser une expression paradoxale), il n'existe que très peu de  conscience entre l'âme et la personnalité, du point de vue de la personnalité sur l'arc évolutif du Sentier de Retour. Tout l'effort de l'homme consiste à prendre conscience de l'âme et à transmuer sa conscience dans celle de l'âme, tout en conservant la conscience de la personnalité. A mesure que la fusion âme-personnalité se renforce, le fil créateur devient de plus en plus actif ; ainsi, les trois fils fusionnent, se mêlent, finissent par dominer, et l'aspirant est alors prêt à combler le hiatus et à unir la Triade spirituelle et la personnalité, par le moyen de l'âme. Ceci implique un effort direct de travail divin créateur. La clé de la compréhension réside peut-être dans la pensée que, jusque là, la relation entre âme et personnalité à été poursuivie assidûment et de manière primordiale par l'âme stimulant la personnalité dans le sens de l'effort, de la vision et de l'expansion. Dès lors – à ce stade – la personnalité intégrée, en développement rapide, devient consciemment active et (à l'unisson avec l'âme) commence à construire l'antahkarana, fusion des trois fils et projection de ceux-ci vers les "étendues plus vastes et plus élevées" du plan mental, jusqu'à ce que le mental abstrait et le mental concret inférieur soient reliés par le câble triple.

C'est à ce processus que nos études se rapportent ; l'expérience antérieure concernant les trois fils est considérée logiquement comme s'étant déroulée de façon normale. L'homme se tient maintenant avec le mental stable dans la lumière ; il a quelque connaissance de la méditation, beaucoup de dévotion, et il perçoit aussi le prochain pas à franchir. La connaissance du processus devient progressivement claire ; un contact grandissant avec l'âme est établi ; parfois surviennent des éclairs de perception intuitive venant de la Triade supérieure. Toutes ces reconnaissances ne sont pas présentes chez tous les disciples ; certaines le sont, d'autres pas. Je m'efforce de brosser un tableau général. L'application individuelle et la réalisation future doivent être accomplies par le disciple dans le creuset de l'expérience.

Le but poursuivi par le disciple moyen dans le passé a été le contact de l'âme, conduisant finalement à ce qui est appelé l' "inclusion hiérarchique". La récompense de l'effort du disciple a été l'admission dans l'ashram de quelque Maître, une possibilité croissante de servir dans le monde, et aussi la prise de certaines initiations. Le but poursuivi par les disciples plus avancés implique non seulement le contact de l'âme en tant que premier objectif (cela a été atteint dans une certaine mesure), mais la construction du pont allant de la personnalité à la Triade spirituelle avec réalisation monadique subséquente, et ouverture à l'initié de la Voie de l'Evolution Supérieure dans ses branches diverses, et ses différents buts et objectifs. La distinction (je ne dis pas la différence et je vous prie de le noter) entre les deux voies apparaît dans les comparaisons suivantes :

Désir – Aspiration. Mental – Projection.

1ère et 2ème Initiation. 3ème et 4ème Initiation.

Intuition et Amour. Volonté et Mental universels.

Le Sentier de Lumière. La Voie de l'Evolution Supérieure.

Le Point de Contact. L'Antahkarana ou Pont.

Le Plan. Le Dessein.

Les trois rangées de Pétales égoïques. La Triade spirituelle.

La Hiérarchie. Shamballa.

L'Ashram du Maître. La chambre du conseil.

Les Sept Sentiers. Les sept Sentiers.

En réalité, vous avez là les deux approches majeures vers Dieu, ou vers le Tout divin, celles-ci se fondant, au moment de la cinquième initiation, dans la Voie Unique qui réunit en elle-même toutes les Voies. N'oubliez pas la déclaration que j'ai souvent répétée, selon laquelle les quatre rayons mineurs doivent se fondre dans le troisième rayon, et que les cinq rayons doivent finalement se fondre dans le deuxième et le premier rayon. Gardez aussi à la mémoire que tous ces rayons ou modes d'Existence sont des aspects ou sous-rayons du deuxième Rayon  cosmique d'Amour et de Feu.

Je souhaite aussi signaler ici quelques relations supplémentaires. Vous savez que sur le plan mental se trouvent les trois aspects du mental, ou les trois points focaux de la perception et de l'activité mentales.

1.

Le mental inférieur concret, qui s'exprime très complètement par le moyen du cinquième rayon, celui de la Science concrète, reflétant la phase inférieure de l'aspect volonté de la divinité et résumant en lui-même toute connaissance ainsi que la mémoire égoïque. Le mental inférieur concret est relié aux pétales de connaissance du lotus égoïque et il peut être illuminé par l'âme de façon prononcée ; il se révèle finalement être le projecteur de l'âme. Il peut être maîtrisé par les processus de concentration. Il est transitoire dans le temps et l'espace. Par un travail conscient et créateur, il peut être relié à l'atome manasique permanent ou au mental abstrait.

2.

Le Fils du Mental. C'est l'âme elle-même gouvernée par le deuxième aspect des sept rayons, point que je vous demande d'enregistrer sérieusement. Il reflète la phase inférieure de l'aspect amour de la divinité, et résume en lui-même les résultats de toute la connaissance accumulée qui est la sagesse illuminée par la lumière de l'intuition. On pourrait exprimer ceci en disant que c'est l'amour tirant profit de l'expérience et de la connaissance. Il s'exprime très complètement par les pétales d'amour de son être inné. Par le service consacré, il met en action le Plan divin dans les trois mondes de l'accomplissement humain. Il est donc relié  au deuxième aspect de la Triade spirituelle et son fonctionnement est engendré par la méditation. Il maîtrise alors et utilise à ses propres fins spirituelles la personnalité consacrée, via le mental illuminé dont j'ai parlé plus haut. Il est éternel dans le temps et l'espace.

3.

Le mental abstrait. Il se révèle très complètement sous l'influence du premier Rayon, celui de Volonté ou de Pouvoir, reflétant l'aspect le plus élevé de la volonté de la divinité ou principe atmique ; lorsqu'il est complètement développé, il résume en lui-même le dessein de la divinité et devient responsable de l'émergence du Plan. Il fournit l'énergie des pétales de volonté jusqu'à ce que la vie éternelle de l'âme soit absorbée dans ce qui n'est ni transitoire, ni éternel, mais infini, sans limites et inconnu. Son fonctionnement conscient est engendré par la construction de l'antahkarana. Ce "pont arc-en-ciel radieux" unit la personnalité illuminée, focalisée dans le corps mental, mue par l'amour de l'âme, avec la Monade ou Vie Une et permet au divin Fils de Dieu manifesté d'exprimer la signification des mots : Dieu est Amour et Dieu est un Feu dévorant. Ce feu, tirant son énergie de l'amour, a brûlé toutes les caractéristiques de la personnalité, ne laissant qu'un instrument purifié, coloré par le rayon de l'âme, et pour qui l'existence du corps de l'âme n'est plus nécessaire. A ce stade, la personnalité a complètement absorbé l'âme, ou pour m'exprimer peut-être plus exactement, l'âme et la personnalité se sont fusionnées, mêlées en un instrument unique au service de la Vie Une.

Ceci n'est qu'une image ou emploi symbolique de mots destinés à exprimer le but d'unification de l'évolution matérielle et spirituelle, conduite à sa conclusion – pour le cycle mondial actuel – au moyen du développement des trois aspects du mental sur le plan mental. Les implications cosmiques ne vous échapperont pas, mais nous n'avons aucun avantage à nous y étendre. A mesure que progresse ce processus, trois grands aspects de la manifestation divine apparaissent sur le théâtre de la vie du monde et sur le plan physique. Ce sont l'Humanité, la Hiérarchie et Shamballa.

L'humanité est déjà le règne dominant de la nature ; le fait de la Hiérarchie et l'imminence de son apparition physique deviennent aujourd'hui des facteurs connus de centaines de milliers de personnes. Plus tard, son apparition reconnue servira de cadre aux nécessaires phases préparatoires conduisant finalement au gouvernement exotérique du Seigneur du Monde, qui sortira de son isolement à Shamballa, et apparaîtra en manifestation à la fin de ce cycle mondial.

Voilà le vaste et nécessaire tableau, présenté afin de donner raison d'être et de pouvoir au prochain stade de l'évolution humaine.

Le point sur lequel je souhaite insister est que c'est seulement quand l'aspirant prend place nettement sur le plan mental, et y maintient de plus en plus le "foyer de sa conscience", qu'il lui devient possible de progresser véritablement dans la construction du pont divin, dans le travail d'invocation, et dans l'établissement d'un rapport conscient entre la Triade, l'âme et la personnalité. La période couverte par la construction consciente d'antahkarana va des derniers stades du Sentier de Probation à la troisième initiation.

En examinant ce processus, il est nécessaire au début de reconnaître les trois aspects du mental s'exprimant sur le plan mental, et engendrant les différents états de conscience de ce plan. Il est intéressant de noter qu'ayant atteint le stade humain développé (présentant intégration, aspiration, orientation, et consécration), l'homme se tient fermement sur les niveaux inférieurs du plan mental ; il se trouve alors face aux sept sous-plans de ce plan, et aux états de conscience correspondants. Il entre donc dans un nouveau cycle où – en possession cette fois de sa pleine conscience de soi – il lui faut développer sept états de perception mentale, tous sont innés ou inhérents à lui-même et tous (lorsqu'ils sont maîtrisés) conduisent à l'une des sept initiations majeures. Voici les sept états de conscience en commençant par le premier ou le plus bas.

Plan mental

1. Conscience mentale inférieure. Développement de la vraie perception mentale.

2. Conscience de l'âme ou perception de l'âme. Il ne s'agit pas de la perception de l'âme par la personnalité, mais de l'enregistrement par l'âme elle-même de ce que l'âme perçoit. Ceci est plus tard enregistré par le mental inférieur. Cette perception de l'âme est donc l'opposé de l'attitude mentale habituelle.

3. Conscience supérieure abstraite. Développement de l'intuition et reconnaissance du processus intuitif par le mental inférieur.

Plan bouddhique

4. Perception spirituelle, consciente, persistante. C'est la pleine conscience du niveau bouddhique ou intuitionnel. C'est la conscience de perception qui est la caractéristique marquante de la Hiérarchie. Le foyer de la vie de l'homme passe sur le plan bouddhique. C'est le quatrième état de conscience ou état médian.

Plan atmique

5. Conscience de la volonté spirituelle telle qu'elle est exprimée et ressentie sur les niveaux atmiques, ou troisième plan de la manifestation divine. Je ne peux dire que peu de chose de cet état de conscience ; cet état de conscience nirvanique n'a que peu de signification pour le disciple.

Plan monadique

6. Conscience inclusive de la Monade sur son propre plan, le deuxième plan de notre vie planétaire et solaire.

Plan logoïque

7. Conscience divine. C'est la conscience du Tout sur le plan le plus élevé de notre manifestation planétaire. C'est aussi un aspect de la conscience solaire sur le même plan.

Alors que nous nous efforçons de parvenir à une vague compréhension de la nature du travail de construction de l'antahkarana, il serait peut-être sage, à titre de stade préliminaire, d'examiner la nature de la substance dont le "pont de matière mentale brillante" doit être construit par l'aspirant conscient. Le terme oriental désignant cette "matière mentale" est  chitta. Elle existe en trois types de substance, tous fondamentalement identiques, mais différents quant à leurs caractéristiques et à leur conditionnement. Une loi fondamentale de notre système solaire, et donc de notre expérience de la vie planétaire, veut que la substance par laquelle la divinité s'exprime (dans le temps et l'espace) soit conditionnée par le Karma ; cette substance est imprégnée de toutes les caractéristiques résultant des manifestations antérieures de l'Etre en qui nous avons la vie, le mouvement et l'être.

C'est le fait fondamental sur lequel repose l'expression de cette Trinité ou Triade d'aspects rendue familière par toutes les religions mondiales. Cette trinité est la suivante :

1.

L'Aspect du Père Le plan sous-jacent de Dieu.

L'aspect Volonté.

Dessein.

La Cause essentielle de l'Existence.

Le dessein de la Vie, motivant

l'évolution.

La note du son synthétique.

utilise le sutratma.

2.

L'aspect du Fils La qualité de la sensibilité.

L'Aspect Amour.

Sagesse. Compréhension.

Conscience. Ame.

La nature des relations.

La méthode d'évolution.

La note du son qui attire.

utilise le fil de conscience.

3.

L'Aspect de la Mère L'intelligence de la substance.

L'aspect de l'Intelligence.

Le Saint Esprit.

La nature de la forme.

Réponse à l'évolution.

La note de la nature.

développe le fil de créativité.

Le plan mental qui doit être franchi est comme un grand courant de conscience ou de substance consciente, et l'antahkarana doit être construit par-dessus ce courant. C'est ce concept qui sous-tend cet enseignement et le symbolisme du Sentier. Avant que l'homme ne puisse fouler le Sentier, il doit lui-même devenir le Sentier. Il doit construire ce pont en arc-en-ciel, cette Voie Illuminée dans la substance de sa propre vie. 

Il le tisse et l'ancre, comme une araignée tisse un fil le long duquel elle peut passer. Chacun de ses trois aspects divins participent à ce pont, et le moment de sa construction est indiqué par le fait que sa nature inférieure :

1. S'oriente, se règle et devient créatrice.

2. Réagit au contact et à la domination de l'âme et les reconnaît.

3. Est sensible à la première impression de la Monade. Cette sensibilité est indiquée par :

a. La soumission à la "volonté de Dieu", ou au grand Tout.

b. Le développement de la volonté spirituelle intérieure surmontant tous les obstacles.

c. La coopération avec le dessein de la Hiérarchie interprétant la volonté de Dieu et l'exprimant par l'amour.

J'ai énuméré ces trois réponses à la totalité des aspects divins car elles sont reliées à l'antahkarana et doivent petit à petit être précisées et conditionnées sur le plan mental. C'est là qu'on les trouve s'exprimant dans la substance :

1. Le mental inférieur concret.

Le sens commun réceptif.

L'aspect le plus élevé de la nature de la forme.

Le reflet d'atma, la volonté spirituelle.

Le centre de la gorge.

La connaissance.

2. Le mental individualisé.

L'âme ou égo spirituel.

Le principe médian. Buddhi-manas.

Le reflet de la Monade dans la substance mentale.

L'amour-sagesse spirituel.

Le centre du coeur.

L'amour.

3. Le mental supérieur abstrait.

Le transmetteur de buddhi.

Le reflet de la nature divine.

L'amour intuitif, la compréhension, l'inclusivité.

Le centre de la tête.

Le sacrifice.

Il existe nécessairement d'autres présentations de ces aspects dans la manifestation, mais ce qui précède servira à indiquer la relation Monade-âmepersonnalité s'exprimant par certains points focalisés de pouvoir sur le plan mental.

Néanmoins, dans l'humanité, la réalisation majeure à saisir au moment actuel de l'évolution humaine est le besoin de lier consciemment et effectivement la Triade spirituelle, l'âme sur son propre plan et la triple personnalité dans sa nature triple.

Ceci par le travail créateur de la personnalité, le pouvoir magnétique de la Triade et l'activité consciente de l'âme, utilisant le fil triple.

Vous pouvez donc voir pourquoi les ésotéristes insistent tellement sur la fusion, l'unité, l'unification ; c'est seulement quand le disciple comprend cela intelligemment qu'il peut commencer à tisser les fils pour en faire un pont de lumière, qui devient finalement la Voie de Lumière qui le conduit vers les mondes supérieurs de l'existence. Il se libère ainsi des trois mondes. Dans notre cycle mondial c'est avant tout une question de fusion et d'expression, dans la pleine conscience de veille, de trois états majeurs de conscience :

1.

Conscience de Shamballa.

Conscience de l'unité et du dessein de la Vie.

Reconnaissance du Plan et coopération au Plan.

Volonté. Direction. Unité.

Influence de la Triade.

2.

Conscience hiérarchique.

Conscience du Soi, de l'âme.

Reconnaissance de la divinité et coopération avec elle.

Amour. Attraction. Relation.

Influence de l'âme.

3.

Conscience humaine.

Conscience de l'âme dans la forme.

Reconnaissance de l'âme et coopération avec elle.

Intelligence, Action, Expression.

L'influence de la personnalité consacrée.

L'homme qui construit finalement l'antahkarana par-dessus le plan mental met en rapport ou relie ces trois aspects divins, de sorte que, petit à petit, à chaque initiation, ils sont de plus en plus fusionnés en une seule expression divine en pleine et radieuse manifestation. En d'autres termes, le disciple foule le sentier de retour, construit l'antahkarana, suit la Voie de Lumière et parvient à circuler librement sur le Sentier de la Vie.

L'un des points essentiels que les étudiants devraient saisir est le fait ésotérique que la construction de l'antahkarana s'effectue par le moyen d'un effort conscient au sein même de la conscience, et non simplement en s'efforçant d'être bon, d'exprimer la bonne volonté ou de manifester les qualités d'altruisme et de haute aspiration.Beaucoup d'ésotéristes semblent considérer que fouler le Sentier est un effort conscient pour surmonter la nature inférieure, exprimer la vie en termes de pensée et mode de vie justes, d'amour et de compréhension intelligente. C'est tout cela  mais bien davantage encore . Un caractère vertueux et une bonne aspiration spirituelle forment une base essentielle. Mais le Maître qui entraîne un disciple s'attend à ce que ces facteurs soient acquis ; c'est l'objectif du Sentier de Probation, que de les instaurer, les reconnaître et les développer.

Mais construire l'antahkarana c'est relier les trois aspects divins. Cela implique une activité mentale intense et exige le pouvoir d'imaginer et de visualiser, ainsi qu'un fervent effort pour bâtir la Voie de Lumière en substance mentale. Cette substance mentale a – comme nous l'avons vu – trois caractéristiques ou une nature triple, et le pont de lumière vivante est une création composite, renfermant :

1. De la force, focalisée et projetée à partir des forces fusionnées de la personnalité.

2. De l'énergie, puisée dans le corps égoïque par un effort conscient.

3. De l'énergie, tirée de la Triade spirituelle.

C'est essentiellement, néanmoins, une activité de la personnalité intégrée et consacrée. Les ésotéristes ne doivent pas croire que tout ce qu'ils ont à faire est d'atteindre négativement quelque activité de l'âme qui s'établira automatiquement après l'acquisition d'une certaine mesure de contact avec l'âme et que, en conséquence, avec le temps, cette activité évoquera une réponse à la fois de la personnalité et de la Triade. Ce n'est  pas le cas. Le travail de construction de l'antahkarana est avant tout une activité de la personnalité, aidée par l'âme, ce qui avec le temps, évoque une réaction de la Triade. Actuellement les aspirants font preuve de beaucoup trop d'inertie.

On pourrait aussi envisager la question sous un autre angle. La personnalité commence à transmuer la connaissance en sagesse, et alors le point focal de la vie de la personnalité est sur le plan mental, car le processus de transmutation (avec ses stades de compréhension, d'analyse, de reconnaissance et d'application) est fondamentalement un processus mental. La personnalité commence aussi à comprendre la signification de l'amour et à l'interpréter en termes de bien du groupe, et non en termes de soi personnel, ou de désir ou même d'aspiration. Le véritable amour n'est correctement compris que par le type mental, orienté spirituellement. La personnalité parvient aussi à saisir qu'en réalité le sacrifice n'existe pas. Le sacrifice n'est habituellement que le désir frustré de la nature inférieure, volontairement supporté par l'aspirant, mais – à ce stade – c'est une interprétation erronée et une limitation. Le sacrifice est véritablement la conformité complète à la Volonté de Dieu, car la volonté spirituelle de l'homme et la volonté divine (telle qu'il la perçoit dans le Plan) est sa volonté. Il y a identification croissante de dessein. En conséquence, la volonté personnelle, le désir et les activités intelligentes à double motivation sont perçues et reconnues comme n'étant que l'expression inférieure des trois aspects divins ; et un effort est fait pour les exprimer en termes d'âme et non comme précédemment en termes de personnalité consacrée et correctement orientée. Ceci ne devient possible, dans son véritable sens, que lorsque le point focal de la vie se situe dans le véhicule mental et que la tête autant que le coeur devient active. Au cours de ce processus, les stades de construction du caractère sont envisagés comme essentiels et efficaces, et ils sont entrepris volontairement et consciemment. Mais – quand les bases d'un caractère vertueux et d'une activité intelligente sont fermement établies – quelque chose de plus élevé et de plus subtil doit être érigé sur cette infrastructure.

La connaissance-sagesse doit être remplacée par la compréhension intuitive ; celle-ci, en réalité, inclut la participation à l'activité créatrice de la divinité. L'idée divine doit devenir l'idéal possible, et cet idéal doit se développer et se manifester dans la substance, sur le plan physique. Le fil créateur, alors relativement prêt, doit être amené à une fonction et à une activité conscientes.

Le désir-amour doit être interprété en termes d'attraction divine, impliquant l'usage correct ou erroné des énergies et des forces. Ce processus met le disciple en contact avec la divinité envisagée comme un Tout progressivement révélé. La partie, par le développement magnétique de sa propre nature, prend petit à petit contact avec tout ce qui est. Le disciple prend conscience de cette totalité par des expansions de conscience de plus en plus vives conduisant à l'initiation, à la réalisation, à l'identification. Ce sont les trois stades de l'initiation.

Le fil de conscience, en coopération avec le fil créateur et le fil de vie, s'éveille à un processus totalement conscient de participation au Plan créateur divin – Plan motivé par l'amour et intelligemment exécuté.

La direction-volonté (mots décrivant l'orientation produite par la compréhension des deux premiers processus : connaissance-sagesse et désir-amour) doit produire l'orientation finale de la personnalité et de l'âme, fusionnées, soudées et unies, vers la liberté de la Triade spirituelle. Alors, la tentative consciente d'utilisation de ces trois énergies aboutit à créer l'antahkarana sur le plan mental.

Notez bien qu'à ce stade de début du processus, je mets l'accent sur les mots "orientation" et "tentative". Ils ne font qu'indiquer la maîtrise définitive de la substance par l'initié.

L'une des indications selon laquelle l'homme n'est plus sur le Sentier de Probation est qu'il sort du domaine de l'aspiration et de la dévotion, pour entrer dans le monde de la  volonté focalisée. Une autre indication est qu'il commence à interpréter la vie en termes d'énergie et de forces, et non en termes de qualité et de désir. Ceci marque un net pas en avant. La volonté spirituelle, résultant d'une juste orientation, est trop peu utilisée dans la vie des disciples, à l'heure actuelle.

A l'avenir, cette science de l'Antahkarana et sa correspondance inférieure, la science de l'Evolution Sociale (qui est l'antahkarana unifié et conjoint de l'humanité dans son ensemble) s'appellera la science de l'Invocation et de l'Evocation. C'est en réalité la science du Rapport magnétique, qui engendre de justes relations par invocation mutuelle, celle-ci produisant un processus de réponse qui est un processus d'évocation. C'est cette science qui est derrière l'éveil conscient des centres et leur interrelation. Elle est sous-jacente au rapport d'homme à homme, de groupe à groupe et finalement de nation à nation. C'est cette invocation, et l'évocation qui s'ensuit, qui relie finalement l'âme et la personnalité, puis l'âme et la monade. C'est l'objectif primordial de l'appel lancé par l'humanité à Dieu, à la Hiérarchie et aux Puissances spirituelles du cosmos, quel que soit le nom qu'on leur donne. L'appel retentit. L'invocation de l'humanité peut et doit susciter, et elle suscitera une réponse de la Hiérarchie spirituelle ; ce sera la première manifestation, sur une grande échelle, de cette science ésotérique nouvelle ésotérique car basée sur le son. D'où l'emploi du O.M. Je ne peux pas ici traiter de cette science ; nous devons réserver notre attention à notre thème, la science de l'Antahkarana.