D. L'art de mourir
L'âme, ayant son siège dans le coeur, est le principe de vie, le principe du libre arbitre, le noyau central d'énergie positive au moyen duquel tous les atomes du corps sont maintenus à leur juste place et subordonnés à la "volonté-d'être" de l'âme.
Ce principe de vie prend le courant sanguin pour mode d'expression et agent de contrôle. Par l'étroite relation entre le système endocrinien et le courant sanguin, deux aspects de l'activité de l'âme sont réunis pour faire de l'homme une entité vivante, consciente, et fonctionnante, gouvernée par l'âme et exprimant les desseins de l'âme dans toutes les activités de la vie quotidienne.
La mort est donc littéralement le retrait hors des centres cardiaque et coronal de ces deux courants d'énergie, avec pour conséquence une perte totale de conscien ce et la désintégration du corps.
La mort diffère du sommeil en ce que les deux courants d'énergie sont supprimés. Dans le sommeil, seul est retiré le fil d'énergie ancré dans le cerveau, et dans ce cas l'homme devient inconscient, c'est-à-dire que sa conscience, ou sens de se rendre compte, est focalisée ailleurs. Son attention n'est plus dirigée vers les objets tangibles et physiques, mais tournée vers un autre monde d'existence et centrée dans un autre appareil ou mécanisme.
Lors de la mort, les deux fils sont retirés ou unifiés dans le fil de vie. La vitalité cesse de se répandre par l'intermédiaire du courant sanguin, le coeur s'arrête de battre, le cerveau cesse d'enregistrer, et ainsi le silence s'installe. La maison est vide.
L'activité prend fin, sauf cette étonnante activité immédiate qui est la prérogative de la matière elle-même et qui s'exprime par le processus de décomposition.
Sous certains aspects, ce processus dénote l'union de l'homme avec tout ce qui est matériel et démontre qu'il fait partie de la nature elle-même. Par nature, nous entendons le corps de la vie unique "en qui nous vivons, nous nous mouvons, et nous possédons notre existence". Toute l'histoire est contenue dans ces trois mots – vivre, se mouvoir, et exister. L'Etre est la conscience, la conscience de soi, et l'expression de soi, dont les symboles exotériques sont la tête et le cerveau de l'homme.
La vie est l'énergie, le désir en forme, la cohésion, et l'adhésion à une idée. Les symboles exotériques en sont le coeur et le sang.
Le mouvement indique l'intégration dans l'activité universelle de l'entité existante consciente et vivante. Les symboles en sont l'estomac, le pancréas, et le foie.
Il y a également lieu de remarquer que le retrait par la mort est entrepris sous la direction de l'Ego, si inconscient que l'homme puisse être de cette gouverne. Pour la majorité, le processus opère automatiquement, car au moment où l'âme cesse de prêter attention à sa manifestation dans les trois mondes il se produit inévitablement une réaction sur le plan physique. Si elle abstrait les deux fils conducteurs de vie et de raison, c'est la mort. Si le fil conducteur de l'énergie qualifiée par la pensée est seul abstrait, le courant de vie continue d'opérer par le coeur, mais sans conscience intelligente. L'âme est engagée ailleurs et absorbée sur son propre plan par ses propres préoccupations.
(Traité sur la Magie Blanche, pages anglaises 496-497)
Avant de traiter ce sujet plus en détail, il y a lieu de connaître quelque peu la "membrane dans le cerveau" qui est intacte chez la majorité des hommes mais n'existe plus chez les clairvoyants illuminés. On sait que le corps humain comporte à son arrière plan un ample corps vital, contrepartie du corps physique et plus vaste que lui, que nous appelons double ou corps éthérique. C'est un corps d'énergie composé de centres de force et de nadis ou filaments de force. Ces derniers sont les contreparties du système nerveux – des nerfs et des ganglions nerveux. En deux endroits du corps humain se trouvent des portes de sortie (si j'ose employer ce terme).
L'une d'elles se trouve dans le plexus solaire, l'autre vers la fontanelle. Toutes les deux sont protégées par une membrane de matière éthérique d'un tissu serré composé de filaments d'énergie vitale entrelacés. Au cours du processus de la mort, la pression d'énergie vitale qui s'exerce sur la membrane produit finalement une perforation ou une ouverture par laquelle la force de vie se répand au dehors à mesure que s'accroît l'influence abstrayante de l'âme. Chez les animaux, les enfants, et les hommes ou femmes entièrement polarisés dans leur corps physique et astral, la porte de sortie est le plexus solaire, et c'est la membrane correspondante qui est perforée pour permettre l'effusion.
Chez les types mentaux et les unités humaines plus hautement évoluées, c'est la membrane céphalique supérieure qui est perforée dans la région de la fontanelle pour permettre la sortie de l'être rationnel pensant.
Le processus de la mort comporte donc deux sorties principales : le plexus solaire pour les êtres humains polarisés astralement et prédisposés physiquement, donc pour la grande majorité, et le centre coronal pour les êtres polarisés mentalement et orientés spirituellement. Tel est le premier et plus important facteur à maintenir présent en mémoire. On conçoit aisément comment l'orientation d'une tendance de vie et le foyer d'attention de la vie déterminent le mode de sortie lors de la mort. Il est également clair que les efforts d'un homme en vue de contrôler sa vie astrale et sa nature émotionnelle, ainsi que pour s'orienter vers le monde mental et les idées spirituelles influencent puissamment les aspects phénoménaux du processus de la mort.
Il est évident pour tout penseur soucieux de précision que l'une des sorties concerne l'homme spirituel et hautement évolué, tandis que l'autre concerne l'être humain inférieur qui n'a guère dépassé le stade animal. Mais qu'en est-il pour l'homme moyen ? Une troisième porte de sortie est actuellement utilisée à titre provisoire. Juste au-dessous de l'apex du coeur se trouve encore une membrane éthérique recouvrant un orifice de sortie. La situation se présente donc comme suit :
1. La sortie par la tête, utilisée par les intellectuels et par tous les disciples et initiés du monde.
2. La sortie par le coeur, utilisée par les hommes et les femmes aimables et bien intentionnés, bons citoyens, amis intelligents, et philanthropes.
3. La sortie dans la région du plexus solaire, utilisée par ceux dont la nature animale est vigoureuse.
Tel est le premier point du nouvel enseignement qui deviendra classique en Occident au cours du prochain siècle.
Une grande partie en est déjà connue des penseurs orientaux, qui le considèrent comme un premier pas vers la compréhension rationnelle du processus de la mort.
(Traité sur la Magie Blanche, page anglaise 500)
En ce qui concerne la technique de la mort, je ne puis actuellement émettre qu'une ou deux suggestions. Elles ne s'appliquent pas au comportement des veilleurs qui accompagnent le mourant. Elles concernent les facteurs qui faciliteront le passage dans l'au-delà de l'âme qui trépasse.
Tout d'abord, que le silence règne dans la chambre, ce qui est fréquemment le cas. Il faut se rappeler que le mourant est généralement inconscient en apparence, mais non en réalité.
Dans neuf cents cas sur mille, le cerveau est conscient et se rend pleinement compte des événements, mais le pouvoir de s'exprimer est complètement paralysé, et l'incapacité de produire l'énergie qui manifestera un signe de vie est totale.
Lorsque le silence et la compréhension règnent dans la chambre mortuaire, l'âme en partance peut conserver la possession de son instrument avec clarté jusqu'au dernier moment et effectuer les préparatifs de départ appropriés.
Dans l'avenir, lorsqu'une connaissance plus approfondie des couleurs aura été acquise, on n'admettra dans une chambre mortuaire que des lumières orangées, et l'on ne les installera avec le cérémonial accoutumé que si toute possibilité de rétablissement est définitivement écartée. L'orangé facilite la focalisation dans la tête, de même que le rouge stimule le plexus solaire, et que le vert produit un effet défini sur le coeur et les courants vitaux.
Lorsque des notions nouvelles relatives aux sons auront été acquises, on utilisera certains genres de musiques, mais il n'en existe actuellement aucune susceptible de faciliter le travail de l'âme pendant qu'elle s'abstrait du corps, bien que certaines notes d'orgue puissent avoir de l'efficacité. Si à l'instant exact de la mort on fait résonner la note répondant au diapason de la personne en cause, cela coordonne les deux courants d'énergie et fait rompre le fil de vie, mais cette connaissance est trop dangereuse pour être actuellement transmise ; il faut la remettre à plus tard. Je me borne à indiquer la direction que prendront dans l'avenir les études ésotériques.
On découvrira également que le trépas est facilité par des pressions sur certains centres nerveux et sur certaines artères.
Bien des lecteurs savent déjà que cette science de la mort est gardée en réserve au Tibet. Sont secourables et efficaces des pressions sur la veine jugulaire, sur certains gros nerfs dans la région de la tête, et sur un point particulier de la moelle allongée. Il est inéluctable qu'une science de la mort soit un jour mise sur pied, mais il faut attendre que l'existence positive de l'âme soit reconnue et que ses relations avec le corps aient été scientifiquement établies.
On fera également entrer en jeu des Mantras ou phrases mantriques, soit que l'entourage les introduisent délibérément dans la conscience du mourant, soit que le mourant lui-même les emploie volontairement et mentalement. Le Christ donna un exemple de leur emploi lorsqu'il s'écria : "Père, je remets Mon esprit entre tes mains."Nous en avons un autre exemple dans les paroles : "Seigneur, laisse maintenant ton serviteur partir en paix."
Il se peut aussi qu'à l'avenir on introduise dans le rituel de transition l'emploi de la Parole Sacrée chantée à mi-voix ou sur une clef particulière convenant au mourant, avec accompagnement d'onction à l'huile comme la tradition en a été conservée par l'Eglise catholique. L'extrême-onction a une base scientifique occulte. Il serait bon que la tête du mourant regardât symboliquement l'Orient, et que ses pieds et ses mains fussent croisés. Nulle combustion d'encens ou d'autres produits ne devrait être autorisée, à l'exception du bois de santal, car le bois de santal est l'encens du Premier Rayon ou Rayon Destructeur, et l'âme est en voie de détruire son habitation.
(Traité sur la Magie Blanche, page anglaise 505)
Les aspirants reconnaissent un facteur plus que tout autre, c'est la nécessité de se libérer de la Grande Illusion. Arjuna le savait, et pourtant il succomba au désespoir. Toutefois, à l'heure critique, Krishna ne lui fit pas défaut, mais exposa dans la Bhagavad Gîta les règles simples permettant de triompher du doute et de la dépression. Les voici brièvement résumées.
a. Connais-toi comme étant Celui qui ne meurt pas.
b. Contrôle ta pensée, car c'est par cette pensée que l'on peut connaître Celui qui ne meurt pas.
c. Apprends que la forme n'est que le voile qui cache la splendeur de la Divinité.
d. Comprends que la Vie Unique imprègne toutes les formes, de sorte qu'il n'existe ni mort, ni détresse, ni séparation.
e. Détache-toi de l'aspect forme, et viens vers Moi pour habiter le lieu où se trouvent la Lumière et la Vie. C'est ainsi que l'illusion prend fin.
(Traité sur la Magie Blanche, page anglaise 308)
Un Maître apprend la signification de toute forme qui enferme, puis il prend le contrôle et applique la loi sur le plan compatible avec la forme. Ayant ainsi par sa croissance dépassé la forme, il la rejette pour en adopter d'autres plus élevées. Il a donc toujours progressé par le sacrifice et la mort de la forme. La forme est toujours reconnue comme une prison. Il faut donc toujours qu'elle soit sacrifiée et meure, pour que la vie intérieure puisse poursuivre sa course et son progrès. Le sentier de la résurrection présuppose la crucifixion et la mort, et conduit ensuite à la montagne où l'on peut effectuer l'Ascension.
(Lettres sur la Méditation Occulte, page anglaise 261)