26. L'état d'asservissement est surmonté par une discrimination parfaitement maintenue.
Un mot au sujet de la discrimination pourrait ici avoir son prix, car elle constitue la méthode majeure pour atteindre à la libération, ou affranchissement hors des trois mondes. Basée comme elle l'est sur la certitude consciente de la dualité essentielle de la nature, et si l'on considère celle-ci comme le résultat de l'union des deux pôles opposés du Tout Absolu, l'esprit et la matière, la discrimination est en premier lieu une attitude du mental et doit être assidûment cultivée. Les prémisses de la dualité sont admises en tant que base logique en vue d'un travail ultérieur, et la théorie est ici mise à l'épreuve en un effort ayant pour but de démontrer la vérité. L'aspirant adopte alors définitivement l'attitude de ce qui est le pôle le plus haut (celui de l'esprit se manifestant comme âme ou régent intérieur) et cherche, dans ses affaires quotidiennes, à établir une distinction entre la forme et la vie, entre l'âme et le corps, entre la somme de la manifestation inférieure (l'homme physique, astral et mental) et le soi réel, cause de cette manifestation.
Au cours de ses activités de chaque jour, il cherche à cultiver en lui la conscience du réel et la négation de l'irréel, en conservant cette attitude à l'égard de toutes ses réactions et de toutes ses affaires. Il s'accoutume, au moyen d'une pratique persistante et sans faille, à distinguer le soi du non-soi et à s'occuper des choses de l'esprit, à l'exclusion de celles de la grande maya ou monde des formes. Cette distinction est théorique au début, puis intellectuelle, mais prend par la suite une plus grande réalité et s'étend aux événements du monde émotif et physique. Grâce à l'observation de cette méthode, l'aspirant pénètre finalement dans une dimension entièrement nouvelle et s'identifie avec une vie et un monde qui sont – en leur mode d'existence – dissociés des trois mondes de l'activité humaine.
Cela étant, son entourage nouveau lui devient familier au point qu'il ne connaît pas seulement la forme, mais aussi la Réalité subjective qui produit ou cause l'existence des formes.
Poursuivant son chemin, il passe alors à la culture de la grande qualité suivante, qui est le manque de passion, ou l'absence de désir. L'homme peut être capable de faire une distinction entre le tangible et le vrai, entre la substance et la Vie qui l'anime, mais désirer cependant l'existence de la forme ou s'en aller "à l'extérieur" au-devant d'elle. Cela doit également être surmonté avant que soient atteintes la libération, l'émancipation ou la liberté parfaite.
Dans l'un des anciens commentaires conservés dans les archives de la Loge des Maîtres, on trouve le texte suivant :
"Il ne suffit pas de connaître le chemin, ni de sentir la force qui sert à extraire la vie des formes de maya. Un événement d'une grande portée doit avoir lieu ; il consiste, pour le chela, à rompre en un seul acte et grâce à un Mot de Pouvoir, le sutratma illusoire qui le lie à la forme. Tel l'araignée ramenant à elle et réabsorbant en elle le fil sur lequel elle s'aventura en des domaines inconnus, le chela se retire de toutes les formes, dans les trois domaines de l'être qui l'ont jusqu'alors attiré."
Ce qui précède mérite d'être soigneusement considéré et peut être relié à la pensée exprimée par la sentence occulte :
"Avant que l'homme puisse fouler le Sentier, il doit devenir lui-même ce Sentier."