CHAPITRE II LE DEVELOPPEMENT CULTUREL DE L'HUMANITE

CHAPITRE II

LE DEVELOPPEMENT CULTUREL DE L'HUMANITE

Civilisation et Culture

On met beaucoup l'accent, aujourd'hui, sur l'éducation, qu'il s'agisse de coordination, de relation, de psychologie, de vocation ou de formation. Il faut ajouter à cela la vieille méthode d'entraînement de la mémoire et la tentative d'instiller la religion dans le mental de l'enfant, ou bien de la passer sous silence de manière délibérée et intentionnelle. L'éducation moderne a été principalement compétitive, nationaliste et donc séparative. Elle a formé l'enfant à considérer les valeurs matérielles comme d'importance majeure, à croire que sa propre nation est aussi d'importance majeure, et que toute autre nation est secondaire. Elle a nourri son orgueil et entretenu la croyance que son groupe et sa nation sont infiniment supérieurs aux autres personnes et aux autres peuples. On lui enseigne donc à être une personne partiale, dont l'appréciation des valeurs mondiales est fausse, et dont les attitudes envers la vie sont caractérisées par le parti pris et le préjugé. On lui enseigne les rudiments des arts pour lui permettre d'agir, avec l'efficacité nécessaire, dans un cadre compétitif et dans l'entourage particulier à sa vocation. Lire, écrire, compter et connaître l'arithmétique élémentaire, sont considérés comme le minimum requis ; on y ajoute aussi, dans beaucoup de pays, et pour une certaine classe d'individus, une certaine connaissance des événements passés, historiques, géographiques, littéraires, philosophiques et scientifiques. On porte aussi à son attention une partie de la littérature mondiale.

Le niveau général d'information, dans le monde, est élevé mais habituellement partial, influencé par des préjugés nationaux ou religieux, ce qui fait de l'homme un citoyen de son propre pays, mais non un être humain en relation avec le monde. On ne met pas l'accent sur la citoyenneté mondiale.

L'enseignement donné stimule la conscience de masse latente chez l'enfant, et fait appel à la mémoire, raciale et individuelle, par la communication de faits – faits sans corrélation – dont la plupart sont sans relation avec la vie quotidienne. S'ils étaient employés techniquement, et comme pensées semences dans la méditation, ces faits pourraient servir à recouvrer, à partir de la conscience et de la mémoire raciales, non seulement l'histoire nationale, mais aussi l'histoire du passé. Je le mentionne afin de faire ressortir le danger d'insister ainsi indûment sur le passé, car si c'était fait sur une grande échelle, ce serait désastreux. Cela donnerait une prime aux idéaux et objectifs raciaux et nationaux, et conduirait rapidement à une cristallisation et une sénilité raciales (en termes métaphoriques). On a vu l'exemple d'un effort en ce sens se développer en Allemagne et, à un moindre degré, en Italie ; l'Axe en est résulté.

Heureusement, on peut faire confiance à la vague de vie animant la jeunesse de toutes les nations, pour lancer la pensée de la race dans une meilleure direction et non évoquer de prétendues gloires passées, et mettre en relief des choses qu'il faudrait laisser derrière soi.

Je souhaite ici interpréter quelque peu des mots très employés et souvent aussi mal employés : culture et civilisation. Car c'est la réalisation d'une certaine forme de culture – matérielle ou spirituelle, ou matérielle et spirituelle – qui est l'objectif de toute éducation. Dans le monde, l'éducation est l'agent majeur.

La civilisation est la réaction de l'humanité au dessein de toute période

mondiale particulière ; au cours de chaque ère, quelque idée doit être exprimée par l'idéalisme courant de la race. Aux temps atlantéens, l'idée qui prédominait était fondamentalement un mysticisme ou idéalisme religieux sensoriel, s'exprimant en termes d'approche vers une divinité non vue, mais sentie ; c'était l'expression d'une manière de sentir. Cependant, il y avait des races hautement sensibles, composées de nations et de groupes qui travaillaient au développement de la nature sensible, quelquefois consciemment, mais en général inconsciemment.

Leur attitude réciproque, en tant qu'individus et nations, était principalement sensible et émotionnelle, état de conscience (je ne peux pas dire état d'esprit) très difficile à saisir, ou même à percevoir par intuition, pour la race aryenne moderne, car en nous, le mental commence à fonctionner. Leur attitude envers la divinité était également sensible, et leurs activités religieuses étaient mystiques et dévotes, complètement dépourvues de compréhension mentale. Ils étaient, de manière significative, émotifs dans leurs réactions à la beauté, à la terreur suscitée par la divinité et aux caractéristiques affectives de Dieu, au sens de la lumière et du merveilleux. Le mystérieux, le sentiment de crainte respectueuse, le fait de suivre aveuglément quelque être "sensible" reconnu, d'un ordre plus élevé que l'être humain ordinaire, et l'interprétation de Dieu et de la nature en termes de sensibilité perceptive, tout cela a posé les bases de l'ancienne civilisation et a beaucoup influencé nos attitudes actuelles ; ceci du moins jusqu'à l'avènement du Christ qui opéra de grands changements dans la conscience humaine, et introduisit une civilisation nouvelle.

Les enfants sont encore en grande partie atlantéens dans leur conscience ; pour eux, c'est une forme de récapitulation, analogue au stade prénatal. La même récapitulation se poursuit sur le sentier, quand l'homme retrouve la conscience mystique, après avoir évoqué sa nature mentale, et avant de s'ouvrir à la vraie connaissance ou conscience occulte, et aux réactions du mental supérieur. Le problème posé à l'éducation est de partir de la conscience atlantéenne de l'enfant et d'en faire une conscience aryenne ou mentale. Les Atlantéens n'avaient pas de système d'éducation, tel que nous l'entendons. Les rois et les prêtres agissaient par intuition ; les masses obéissaient.

Dans la race actuelle, une attitude civilisée différente se fait jour. A chaque époque, quelque idée s'exprime par l'idéalisme, à la fois racial et national. Sa tendance de base, au cours des siècles, a produit notre monde moderne, et elle a été strictement matérialiste. Une nation aujourd'hui est considérée comme civilisée lorsqu'elle est éveillée aux valeurs mentales et qu'en même temps elle demande des valeurs matérielles ; et aussi, quand le mental (mental inférieur) – dans son aspect mémoire, ses aspects de séparation et de discernement, son aptitude à formuler des idées concrètes fondées sur la perception matérielle, sur le désir matériel et sur les desseins matériels – reçoit l'instruction qui aboutit à une civilisation matérielle, faisant de notre civilisation matérielle ce qu'elle est aujourd'hui. Etant donné que l'accent se déplace de la perception sensible à l'attitude mentale envers la vie, étant donné la tendance de considérer la vie matérielle du citoyen de toutes les nations, comme le facteur dominant de la pensée nationale, étant donné le développement du mental consacré au mode de vie matériel et la science délibérément engagée à n'énoncer que ce qui peut être prouvé et ne s'occupant que des énergies à effet matériel, est-ce étonnant que l'intérêt majeur de notre civilisation moderne se situe dans le domaine de l'économie ? Nous nous préoccupons des conditions matérielles ; nous avons pour objet d'accroître nos possessions, d'améliorer les situations dans le monde d'ici-bas, de perfectionner la vie du plan physique, de substituer le tangible à l'intangible, le concret au spirituel, et les valeurs physiques aux valeurs subjectives. Néanmoins, ces dernières devront un jour apparaître et s'exprimer.

La déclaration ci-dessus est superficielle et de caractère si général qu'elle ne tient pas compte de la minorité relativement faible qui sent les valeurs plus vastes et travaille à les faire apparaître dans la vie des hommes. Ces personnes sont les gardiennes des idéaux avancés de la civilisation actuelle, mais l'énergie qu'elles libèrent a souvent pour résultat l'établissement temporaire de valeurs plus concrètes. Mes remarques ne sont que partielles, et les faits également.

J'exagère peut-être, peut-être pas. Néanmoins, le fait demeure que les deux grandes civilisations dont nous pouvons vraiment savoir quelque chose – l'aryenne et l'atlantéenne – présentent les deux positions ou objectifs extrêmes, vers lesquels l'humanité des deux périodes a dirigé et dirige encore son attention.

La civilisation atlantéenne était nettement religieuse dans ses attitudes ; la religion était le lieu commun de la vie et la raison d'être de tout ce qui existait.

Le monde d'après la mort était l'objet d'intérêt et de croyance inébranlable et incontestée. Les influences subtiles émanant des règnes invisibles, les forces de la nature et leur relation avec l'homme, vu sa sensibilité aiguë, et toute la gamme de ses attitudes émotionnelles constituaient la vie, et influençaient ce qu'il y avait, ou ce qu'il aurait pu y avoir, de pensée embryonnaire. Le résultat de tout cela, hérité par nous quand l'histoire telle que nous la connaissons se fit jour (à partir du déluge, quelle qu'en ait été la date) peut s'exprimer par les mots animisme, spiritualisme, psychisme intérieur et sensibilité. Le sens de Dieu, le sens de l'immortalité, le sens de l'adoration et la sensibilité excessive de l'homme moderne, sont l'héritage marquant que nous avons reçu des civilisations de l'ancienne Atlantide.

Sur cette structure de base, on impose aujourd'hui exactement le contraire, et par réaction – normale, juste, en développement – l'homme établit une superstructure où l'accent est de plus en plus mis sur le tangible, le matériel, le vu, sur ce qui peut être prouvé, diagnostiqué, analysé, utilisé pour améliorer la vie extérieure de l'homme, et sa position matérielle sur la planète. Les deux civilisations ont été trop loin, et le mouvement du pendule va inévitablement nous ramener à une position médiane, au "noble sentier du milieu". Cette voie médiane, utilisant les idéaux les meilleurs et les plus élevés produits par les deux civilisations précédentes, caractérisera l'ère du Verseau, et ses civilisations. Une telle expression du matériel et de l'immatériel, du visible et de l'invisible, du tangible et du spirituel, a toujours été le but de ceux qui comprennent le véritable sens de la culture. En dernière analyse et pour les desseins de notre thème, la civilisation concerne les masses et la conscience de masse, tandis que la culture concerne l'individu et l'homme spirituel invisible. Donc, une civilisation exprimant complètement la vraie culture se trouve très loin en avant dans le développement de l'humanité.

La culture est le rapprochement de deux manières d'être, affective et mentale ; de deux mondes, sensibilité et pensée ; et des attitudes de relation qui permettront à l'homme de vivre comme un être subjectif intelligent dans un monde physique tangible. L'homme cultivé lie le monde des causes au monde des apparences, et les considère dans son mental (donc dans son cerveau, ce qui indique l'existence d'une relation) comme constituant un seul monde à deux aspects. Il se meut avec une égale liberté dans les deux mondes, et avec simultanéité en ce qui concerne sa conscience. Même aux temps atlantéens, certaines personnes comprenaient la signification de la culture en tant que conséquence naturelle de la civilisation.

Il faut civiliser les masses ; c'est un pas vers la culture qui leur sera donnée, pour en faire des hommes véritables et de valeur. Un homme doit forcément être capable de vivre dans le monde des réalités extérieures et, en même temps, de se rendre compte qu'il vit dans un monde intérieur, en tant que mental et âme. Il exprime alors une vie subjective intérieure d'une telle puissance qu'elle domine la vie du plan physique, lui donnant ses mobiles et sa vraie direction. Cette attitude de l'être humain et la tâche d'amener cet état de conscience à maturité ont été considérées depuis des siècles comme la tâche de la religion organisée, tandis que c'est essentiellement et nécessairement celle de l'éducation. Il est vrai que l'Eglise d'autrefois avait le rôle d'éducateur, mais l'accent était mis sur la vie subjective intérieure ; en général, il n'existait aucune tentative de faire fusionner l'existence de bien-être matériel extérieur et l'existence spirituelle intérieure. L'éducation est la tâche des penseurs les meilleurs et la responsabilité de tous les gouvernements, responsabilité qu'ils reconnaissent rarement.

Finalement, nous essaierons de voir quelles sont les idées de base (en commençant par les instincts reconnus) qui ont conduit l'homme, pas à pas. à sa lutte actuelle pour l'amélioration du monde, l'élévation sociale, l'autodétermination naturelle, dans l'intention – inconsciente pour la plus grande part – de fournir un meilleur organe d'expression au sein de l'organisme vivant qu'est l'humanité.

C'est donc un truisme de déclarer qu'aujourd'hui l'humanité traverse une crise d'immenses proportions. Les causes de cette crise doivent être cherchées dans beaucoup de facteurs. Elles se trouvent dans le passé, dans le développement par l'évolution de certaines tendances fondamentales chez l'homme, dans les erreurs passées. dans les occasions offertes actuellement et dans l'activité puissante de la Hiérarchie d'Amour 1*. L'avenir est très prometteur, pourvu que l'homme apprenne les leçons du présent qui lui ont été clairement présentées ; il doit les accepter, comprendre clairement la nature de son problème et de la crise, avec ses nombreuses ramifications et ses diverses implications.

1* L'un des trois centres majeurs par lesquels la divinité se manifeste : Shamballa, où la volonté de Dieu est connue ; la Hiérarchie, où l'amour de Dieu domine ; l'humanité incarnant l'aspect Intelligence de Dieu.

L'agitation bouillonnante dans laquelle vivent les masses actuellement et l'apparition d'un ou de deux personnages-clé par nation ont une relation étroite.

Ces individus font entendre leur voix et suscitent l'attention ; leurs idées sont suivies – à tort ou à raison – avec attention, estime, ou méfiance.

La formation lente et précise du Nouveau groupe des serviteurs du monde indique la crise. Ce groupe veille à l'introduction du nouvel âge ; il est présent aux douleurs d'enfantement de la civilisation nouvelle, à la manifestation d'une nouvelle race, d'une nouvelle culture et d'un point de vue mondial nouveau. Ce travail est nécessairement lent ; ceux qui sont plongés dans les problèmes et la souffrance trouvent difficile d'envisager l'avenir avec assurance, ou  d'interpréter le présent avec clarté.

Dans le domaine de l'éducation, l'unité d'action est essentielle. Une unité fondamentale d'objectifs devrait, sans aucun doute, gouverner les systèmes d'éducation des nations, même si l'uniformité de méthodes et de techniques n'est pas possible. Les différences de langue, d'éléments acquis et de culture  existeront et devront toujours exister ; elles constituent la splendide tapisseriede la vie humaine à travers les âges. Mais beaucoup de ce qui a jusqu'ici entravé les bonnes relations humaines doit être éliminé.

Dans l'enseignement de l'histoire, par exemple, allons-nous en revenir aux anciens errements, où chaque nation se glorifie, fréquemment aux dépens d'autres nations, où les faits sont systématiquement travestis, où les pivots de l'histoire sont les diverses guerres au cours des siècles, donc, une histoire d'agression, de montée d'une civilisation matérielle et égoïste, d'esprit nationaliste et donc séparatif qui a entretenu la haine raciale et stimulé l'orgueil national ? La première date historique dont le petit Anglais moyen se souvient habituellement est "Guillaume le Conquérant, 1066". L'Américain se souvient du débarquement des Pères Pèlerins et de la conquête progressive du pays dépossédant ses habitants légitimes.

Les héros de l'histoire sont tous des guerriers : Alexandre le Grand, Jules César, Attila, Richard Coeur de Lion, Napoléon, George Washington et beaucoup d'autres. La géographie est en grande partie l'histoire sous une autre forme mais présentée de manière semblable, une histoire de découvertes, de recherches et de mainmises, fréquemment suivies de traitement cruel et inique des habitants des terres découvertes. La cupidité, l'ambition, la cruauté et l'orgueil, sont les notes-clé de notre enseignement de l'histoire et de la géographie.

Les guerres, les agressions, et les spoliations, qui ont caractérisé toutes les grandes nations sans exception, sont des faits qui ne peuvent être niés. Mais, néanmoins, la leçon donnée par les maux qui s'en sont suivis (dont la guerre 1914-1945 a été le point culminant) peut être mise en lumière, et on peut indiquer les causes anciennes des préjugés et des antipathies d'aujourd'hui, et insister sur leur puérilité. N'est-il pas possible de construire une théorie de l'histoire sur les grandes et belles idées qui ont conditionné les nations et en ont fait ce qu'elles sont, et de mettre l'accent sur la créativité qui les a toutes caractérisées ? Ne pouvons-nous pas présenter plus efficacement les grandes époques culturelles qui – apparaissant soudain dans une nation – ont enrichi le monde entier et donné à l'humanité sa littérature, son art et sa vision ?

La guerre a causé de grandes migrations. Des armées ont parcouru toutes les parties du monde et s'y sont battues ; des peuples persécutés ont fui d'un pays pour se rendre dans un autre ; des hommes aux sentiments humanitaires sont allés de pays en pays, au service des soldats, soignant les malades, nourrissant les affamés et étudiant les conditions du milieu. Le monde aujourd'hui est très très petit, et les hommes découvrent (parfois pour la première fois de leur vie) que l'humanité est une, que tous les hommes se ressemblent, quelle que soit la couleur de leur peau, quel que soit le pays où ils vivent. Nous sommes tous mélangés aujourd'hui. Les Etats-Unis sont composés de personnes de tous les pays connus ; l'URSS est composée de cinquante races ou nations. Le Royaume Uni est une Communauté de nations indépendantes, liées ensemble en un seul groupe. L'Inde est composée d'une multiplicité de peuples, de religions, de langues, d'où son problème. Le monde est un grand creuset d'où l'Humanité Une est en train d'émerger. Ceci impose un changement radical de ces méthodes de présentation de l'histoire et de la géographie. La science a toujours été universelle. Le grand art et la littérature ont toujours appartenu au monde entier. C'est sur ces faits qu'il faut construire l'éducation à donner aux enfants, éducation basée sur les ressemblances, les réalisations dans la création, les idéalismes spirituels et les points de contacts.

Si on ne le fait pas, les plaies des nations ne seront jamais guéries. et les barrières qui ont existé depuis des siècles ne disparaîtront jamais.

Les éducateurs, placés en face de l'occasion mondiale actuelle, devraient veiller à ce que l'on pose de saines bases pour la prochaine civilisation ; ils doivent entreprendre ce qui est d'envergure générale et universelle, véridique dans sa présentation, constructif dans sa manière d'aborder les problèmes. Les mesures initiales que prendront les éducateurs de tous les pays détermineront inévitablement la nature de la civilisation à venir.

Ils doivent se préparer à une renaissance de tous les arts et à un flux libre et nouveau de l'esprit créateur de l'homme. Ils doivent donner beaucoup d'importance aux grands moments de l'histoire humaine où la divinité de l'homme a brillé d'un vif éclat et indiqué de nouveaux modes de pensée, de nouvelles manières de faire des plans, modifiant ainsi pour toujours le cours des affaires humaines. Ces moments ont produit la Grande Charte ; ils ont mis l'accent, par la Révolution française, sur les concepts de liberté, d'égalité, de fraternité ; ils ont formulé la Déclaration des droits en Amérique, et, de nos jours, en haute mer, ils nous ont donné la Charte de l'Atlantique et les Quatre Libertés. Ce sont les grands concepts qui doivent gouverner le nouvel âge, avec sa civilisation naissante et sa future culture. Si l'on enseigne aux enfants d'aujourd'hui la signification de ces cinq grandes déclarations, et qu'on leur montre en même temps la futilité de la haine et de la guerre, on peut espérer un monde meilleur, plus heureux et aussi plus sûr.

Deux idées majeures devraient être enseignées aux enfants de tous les pays. Ce sont : la valeur de l'individu et le fait de l'humanité une. Les garçons et les filles, contemporains de la guerre, ont appris par les apparences que la vie humaine est de peu de valeur ; les pays fascistes ont enseigné que l'individu est sans valeur, sauf dans la mesure où il met en oeuvre les desseins de quelque dictateur, un Hitler ou un Mussolini. Dans d'autres pays, certaines personnes et certains groupes – de par leur situation héréditaire et leurs ressources financières – sont considérés comme importants, et le reste de la nation, comme de peu d'importance. Dans d'autres pays encore, l'individu se considère comme de telle importance, et son droit d'agir à sa guise comme si capital, que sa relation avec le tout est complètement perdue. Cependant, la valeur de l'individu et l'existence de ce tout que nous appelons l'Humanité sont très étroitement reliées. Il faut y insister. Ces deux principes, lorsqu'ils seront correctement enseignés et compris, conduiront à une intensive culture de l'individu, et à la reconnaissance de sa responsabilité en tant que partie intégrante du corps tout entier de l'humanité.

Dans toutes les écoles d'aujourd'hui, on peut voir l'image imparfaite et symbolique du triple objectif de la nouvelle éducation : Civilisation, Culture, Unification.

Les écoles primaires pourraient être considérées comme les gardiennes de la civilisation ; elles doivent préparer l'enfant à l'état de citoyen, lui enseigner sa place en tant qu'unité sociale, insister sur les relations de groupe, lui permettant ainsi de vivre intelligemment et d'évoquer la mémoire du passé par les cours qu'il reçoit, afin de poser les bases de ses relations humaines. La lecture, l'écriture et l'arithmétique, l'histoire élémentaire (avec l'accent sur l'histoire du monde), la géographie et la poésie seront enseignées. L'école devra lui enseigner certains faits de base importants concernant la vie, les vérités fondamentales, la coordination et la maîtrise de soi.

Les écoles secondaires devraient se considérer comme les gardiennes de la culture ; elles devraient insister sur les valeurs plus larges de l'histoire et de la littérature, et donner quelques notions de l'art. Elles devraient commencer à entraîner garçons et filles à leur future profession, ou au mode de vie qui les conditionnera. L'état de citoyen sera enseigné en termes plus vastes, le monde des vraies valeurs sera mis en lumière, l'idéalisme consciemment et véritablement cultivé. L'école insistera sur l'application pratique des idéaux.

Elle instruira la jeunesse de manière telle, que celle-ci commencera à fusionner, dans sa conscience, le monde des apparences et le monde des valeurs et des causes. Ces jeunes devraient commencer à relier le monde de la vie extérieure objective, et celui de la vie intérieure subjective. Je choisis mes mots avec soin.

Les écoles supérieures et les universités devraient être une extension de tout ce qui a déjà été fait. Elles devraient embellir et compléter la structure qui a déjà été érigée, et traiter plus directement du monde des causes. Les problèmes internationaux – économiques, sociaux, politiques et religieux – devraient être envisagés, et l'homme plus précisément relié au monde entier.

Ceci n'indique nullement que seront négligés les problèmes individuels ou nationaux ; mais on cherchera à les incorporer dans le tout, en tant que parties intégrantes et effectives, évitant ainsi les attitudes séparatives qui ont amené la faillite du monde moderne.

L'université, en réalité, devrait correspondre dans le domaine de l'éducation au monde de la Hiérarchie ; elle devrait être la gardienne des méthodes techniques et systèmes de pensée et de vie qui relieront l'être humainaux mondes des âmes, au Royaume de Dieu, et non seulement aux autres êtres humains sur le plan physique ; non seulement au monde des phénomènes, mais aussi au monde intérieur des valeurs et de la qualité.

A nouveau, je répète que la préparation de l'homme à être un citoyen du royaume de Dieu n'est pas essentiellement une activité religieuse à mettre entre les mains des représentants des grandes religions. Ce devrait être la tâche de l'éducation supérieure donnant un but et une signification à tout ce qui a été fait. Si cela vous semble idéaliste et impossible, permettez-moi de vous assurer qu'au moment où l'ère du Verseau sera complètement épanouie, ce sera l'objectif reconnu et certain des éducateurs de ce temps-là.

La succession suivante s'offre à la pensée, lorsque nous envisageons le plan des programmes destinés à la jeunesse d'aujourd'hui :

Instruction primaire Civilisation Ages 1-14

Instruction secondaire Culture Ages 14-21

Instruction supérieure Spirituelle Ages 21-28

C'est seulement la pression et l'accent mis sur ce qui est matériel et économique qui obligent les jeunes à travailler avant qu'ils ne soient mûrs. Il faut aussi se souvenir (et ceci est plus généralement reconnu) que la qualité des enfants venant maintenant en incarnation devient régulièrement meilleure et plus élevée. Ils sont, dans beaucoup de cas, anormalement intelligents, et ce que vous appelez le quotient d'intelligence est fréquemment très élevé. Cela se produira de plus en plus jusqu'à ce que des jeunes de quatorze ans aient les moyens et l'intelligence des étudiants d'université brillants d'aujourd'hui.

Je ne peux pas prouver la vérité de ces déclarations, mais une étude de l'humanité et de l'enfant des pays développés indiquera des orientations et des tendances qui rendront ma position plus solide, dans votre estimation. Vous feriez bien d'étudier soigneusement la distinction entre la civilisation et la culture.

Pour exprimer la même vérité en termes différents, et en reconnaissant comme prémisse de base le potentiel essentiellement supra-normal de l'être humain, on pourrait dire :

Le premier effort de l'éducation pour civiliser l'enfant sera d'exercer et de diriger intelligemment ses instincts.

La seconde obligation de l'éducateur sera de le faire parvenir à la vraie culture en l'entraînant à utiliser correctement son intellect.

Le troisième devoir sera de susciter et de développer l'intuition.

Quand ces trois aspects seront développés et fonctionneront, on aura un être humain civilisé, cultivé, éveillé spirituellement, un homme aux instincts justes, à l'intelligence solide, à l'intuition consciente. Son âme, son mental et son cerveau fonctionneront comme ils le doivent, en justes relations réciproques, ce qui, de plus, produira la coordination et l'alignement correct. Un jour, on fera une analyse de la contribution des trois grands continents – Asie, Europe et Amérique – à ce triple développement, en ce qui concerne la race aryenne. Il faut, néanmoins, se souvenir de la gloire de l'humanité ; elle consiste en ceci : chaque race a produit des hommes qui ont exprimé le summum de ce qui était possible à leur époque, des hommes qui ont fusionné en eux-mêmes la triplicité : instinct, intellect et intuition.

Leur nombre était relativement faible dans les premiers stades du développement humain, mais le processus d'accélération du développement progresse rapidement, et nombreux sont ceux, actuellement, qui se préparent à "l'éducation supérieure" dans le vrai sens du terme. On fera beaucoup mieux quand les éducateurs du monde entier saisiront le dessein et le processus comme un plan complet de développement, et porteront leur attention sur l'instruction instinctive, intellectuelle et intuitive, de telle manière que la totalité des vingt-huit années d'instruction apparaîtra comme un processus ordonné, dirigé, dont le but fera l'objet d'une claire vision.

Il apparaîtra alors que les enfants à instruire seront jaugés selon les points de vue dont j'ai parlé :

a. Ceux qui sont capables d'être correctement civilisés. Il s'agit des masses.

b. Ceux que l'on pourra faire progresser jusqu'au monde de la culture. Ils sont en très grand nombre.

c. Ceux qui peuvent ajouter, aux avantages de la civilisation et de la culture, les moyens nécessaires pour fonctionner comme âmes conscientes, non seulement dans le monde de la vie instinctuelle et intellectuelle, mais aussi dans le monde de la vie spirituelle, en gardant cependant une complète continuité de conscience et une complète intégration triple.

Tous ne peuvent pas passer dans les degrés supérieurs, et ceci doit être évalué. L'estimation de l'aptitude sera fondée sur une compréhension des types de rayon (science de la psychologie ésotérique), sur une compréhension de l'état glandulaire et physiologique, sur certains tests spécifiques, et sur la nouvelle forme d'astrologie.

Je voudrais ici faire une simple demande à l'étudiant sérieux. Réfléchissez aux quatre déclarations suivantes :

1. L'antahkarana exprime la qualité du magnétisme qui ouvre la porte du centre d'enseignement de la Grande Loge Blanche.

2. L'antahkarana est la force d'intégration consciente.

3. L'antahkarana est le moyen de transfert de la lumière.

4. L'antahkarana concerne la continuité de la perception de l'homme.